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Le Tour de France, succès populaire international et mastodonte économique

envoyé spécial de France 24 sur le Tour de France – Cette année encore, des millions de personnes se sont rendues sur le bord de la route empruntée par le peloton du Tour de France 2015. Un succès populaire qui s’étend surtout à l'étranger et qui attire des sponsors de plus en plus engagés.

Au bord de la route, ils se massent par centaines, en rangs d’oignons, avec l’espoir de voir passer leurs favoris en tête. Chaque année, la haute montagne est le théâtre des grands moments du Tour, et cette édition 2015 n’aura pas fait relâche, livrant son épilogue dans les derniers mètres de l'Alpe d'Huez. À l'image de cette ascension mythique, où les coureurs doivent tout bonnement fendre la foule, un constat s’impose : l’engouement des spectateurs est toujours aussi impressionnant.

D’Utrecht à Paris, quelque 12 millions de personnes ont pris place sur le bord des routes pour scander les noms de leurs héros en plein effort. Un chiffre comparable à celui avancé par l’organisation les années précédentes.

La formule consacrée est donc autant un poncif qu'une réalité : le Tour est bel et bien un succès populaire… et il l’a toujours été. Même à la fin des années 90, alors que le cyclisme était gangrené par les scandales de dopage, les spectateurs répondaient présent par millions.

Cette foule compacte et bruyante est un formidable laboratoire : au bord des routes, les réputations des coureurs se font, se défont… Les pronostics fusent, avec plus ou moins d'inspiration. Le bas-côté du Tour, c’est un gigantesque café du commerce dont le comptoir s’étend, chaque année, sur plus de 3 000 kilomètres.

Avec les années, ce zinc fait de bitume et de gravillons a mué. L'image stéréotypée de la "famille 'camping-car' à la française", accompagnée de la sainte-trinité "marcel-bob-Pastis" a bel et bien vécu. Au bord de la route, plus que jamais, on entend parler français, bien sûr, mais aussi espagnol, italien, anglais, arabe, néerlandais, allemand, japonais…

Un succès populaire international

Une étude publiée mardi 21 juillet par l’agence Repucom matérialise cet engouement mondialisé pour le Tour. Le document, qui se base sur un échantillon de près de 11 000 personnes interrogées dans 11 pays, confirme que l’intérêt des populations est à la hausse depuis trois ans. En 2012, 20 % des personnes interrogées se déclaraient "intéressées" ou "très intéressées" par le Tour de France. Ils sont désormais 23 %.

Sans surprise, les bastions traditionnels de la "petite reine" occupent les premiers rangs de ce classement : l’Espagne (38 %), les Pays-Bas (33 %), la France (32 %) et l’Italie (30 %) forment un Top 4 plutôt logique et globalement stable.

Derrière, en revanche, les chiffres sont plus surprenants. L’on y apprend notamment qu'aux Émirats arabes unis, 20 % de la population suit le Tour, contre à peine 6 % trois ans plus tôt. En Malaisie, cette proportion passe à 23 %, en hausse de cinq points. Et même aux États-Unis, où le scandale Armstrong avait quelque peu érodé la popularité du vélo, on constate une augmentation de quatre points en trois ans, à 18 %.

Une impulsion provoquée par la direction du Tour de France il y a une quinzaine d’années. Sur les 21 départs de la Grande Boucle donnés hors de l’Hexagone, huit l’ont été après les années 2000.

L'intérêt pour @letour détaillé pays par pays. En savoir plus : http://t.co/l4VrKFmij8 pic.twitter.com/djCw4pPler

— Repucom France (@RepucomFr) 22 Juillet 2015

Une manne pour l’organisation…

Cette internationalisation de l’intérêt porté au Tour de France, palpable jusqu’au bord de la route, a permis au propriétaire de l’épreuve Amaury Sports Organisation (ASO) d’en faire une machine commerciale très efficace.

La caravane de 30 kilomètres qui précède les coureurs génère aujourd’hui jusqu’à 40 % des revenus engrangés par l’organisation à chaque édition. C'est presque autant que les 50 % qui proviennent des droits TV dont s'acquittent les quelque 190 pays qui retransmettent la course.

Une manne dont l'ampleur prend tout son sens quand on se rappelle qu’il y a quelques jours, le patron de la Tinkoff-Saxo Oleg Tinkov estimait qu’ASO engrangeait quelque "18 millions d'euros net de bénéfice par an". Le chiffre n’a évidemment pas été confirmé par l’organisation, mais il illustre en tout cas toute l’ampleur de l’enjeu économique en fond de toile.

…et les sponsors

Sans surprise, les sponsors ont suivi la dynamique. Pour la première fois, ils sont cinq à se partager le statut privilégié – et très onéreux – de membre du "Club du Tour". Il s’agit de Carrefour, Skoda, Vittel, LCL et Krys. À l’exception du dernier, numéro 2 de l’optique en France, tous ces partenaires de la Grande Boucle sont des multinationales dont les marchés s’étendent sur l’ensemble du globe, et qui disposent d'une surface financière suffisamment large pour s’offrir un ticket d’entrée estimé entre 3 et 5 millions d’euros.

"Nous considérons que chaque euro investi doit nous apporter le double en retombées et, croyez-moi, on y est largement", expliquait Sébastien Auguin, patron du marketing chez Skoda, dans une interview accordée au quotidien La Croix à la mi-juillet.

Un calcul que ne renie pas la quarantaine d’enseignes qui apposent leur nom à la prestigieuse course. Elles mettent même le paquet. Tee-shirts, porte-clés, casquettes ou sacs… Près de 14 millions de cadeaux promotionnels ou goodies sont distribués aux spectateurs sur les routes du Tour chaque année.

Plus que le maillot jaune ou le vainqueur de l’étape du jour, la caravane est donc la véritable star du Tour de France. ASO ne s’en cache pas : 47 % des personnes interrogées reconnaissent qu’elles viennent autant pour le défilé publicitaire que pour le peloton. Et sur le bord de la route, à en juger par la passion qui anime les "chasseurs de goodies", la grande fête du cyclisme dure bien toute la journée et dans toutes les langues.