
L'espace aérien entre l'Algérie et le Burkina Faso et le Niger a-t-il été fermé à la suite des tensions entre le Mali et l'Algérie ? C'est ce qu'affirment plusieurs comptes en ligne sur X et Facebook depuis le 7 avril, à la suite de l'escalade des tensions entre l'Algérie et les pays de l'Alliance des États du Sahel, composée du Mali, du Burkina Faso et du Niger.
Un espace aérien fermé entre l'Algérie et le Mali…
D'où proviennent ces tensions ? De la destruction d'un drone malien par l'Algérie à la frontière entre les deux pays dans la nuit du 31 mars au 1er avril, qui a suscité des réactions diplomatiques en chaîne.
Le 6 avril, l'AES a publié un communiqué accusant Alger d'être un "exportateur de terrorisme". Les trois pays alliés ont également annoncé rappeler leurs ambassadeurs en Algérie. Ces mesures ont suscité des représailles de la part de l'Algérie, qui a "regretté l'alignement inconsidéré du Niger et du Burkina sur les thèses fallacieuses du Mali" dans un communiqué publié le 7 avril.
Le pays a, à son tour, rappelé ses ambassadeur au Mali et au Niger, et a différé la prise de poste de celui du Burkina Faso. Le même jour, l'Algérie a également annoncé fermer son espace aérien au Mali "face aux violations répétées" de cet espace par son voisin. Une décision qui a poussé le Mali à fermer à son tour son espace aérien aux avions algériens "en guise de réciprocité".
…mais pas avec le Niger et le Burkina Faso
Mais depuis, de nombreux comptes pro-AES en ligne affirment que le Niger et le Burkina Faso auraient également fermé leur espace aérien à l'Algérie, en solidarité avec le Mali.
"Enfin, tous les pays de l’AES ont fermé leur espace aérien au pays voyou qu’est l’Algérie", soutient par exemple le compte Histoires d'Afrique, régulièrement épinglé pour partager de fausses informations. "Voilà une union sans hypocrisie : tu touches à l’un, tu as affaire à nous tous", a-t-il soutenu dans un post publié le 8 avril.
Plusieurs visuels ont également commencé à circuler, montrant une carte de la région indiquant que les avions algériens seraient obligés de contourner les trois pays de l'AES par la Libye et le Tchad pour accéder au sud du continent.

Mais en réalité, ni le Burkina Faso, ni le Niger n'ont prononcé de telles mesures contre l'Algérie, contrairement au Mali.
Contacté par la rédaction des Observateurs, la plateforme d'observation du trafic aérien en ligne FlightRadar24 a indiqué ne pas avoir "constaté de fermetures supplémentaires de l'espace aérien affectant les vols de/vers l'Algérie au-delà des fermetures réciproques avec le Mali reflétées dans les NOTAM".
La plateforme fait ici référence à ces documents appelés "Notice to Airmen", qui sont des messages publiés par les agences gouvernementales de contrôle de la navigation aérienne pour informer les pilotes. La plateforme a également expliqué toujours "observer du trafic en provenance d'Algérie et transitant par le Niger".
Grâce à cette plateforme d'observation du trafic aérien en ligne, il est en effet possible d'observer des vols toujours réguliers entre ces pays depuis le 7 avril.
Le 8 avril, alors que les premières rumeurs sur la fermeture de l'espace aérien du Niger et du Burkina Faso circulaient, plusieurs internautes ont par exemple noté que le vol de la compagnie algérienne Air Algérie entre Abidjan, en Côte d'Ivoire, et Alger, qui survolait d'ordinaire le Mali, avait contourné le pays par le Burkina Faso, puis le Niger, comme le montre son trajet visible sur le site de FlightRadar24 (voir ci-dessous).

Depuis cette date, plusieurs autres vols ont également circulé entre l'Algérie et ces deux pays de l'AES. C'est notamment le cas de plusieurs vols entre la capitale du Niger, Niamey et Alger, les 8, 9 et 10 avril (voir également ici), ou d'un autre vol Abidjan-Alger le 10 avril, comme la rédaction des Observateurs a pu l'observer sur FlightRadar24.
Confronté à ces informations par des internautes sur X, le compte Histoires d'Afrique a toutefois de nouveau affirmé que le Niger avait fermé son espace "aux voyous de l'Algérie" dans un post publié le 10 avril.
Attaque de drone : une "agression" contre l'AES
Malgré tout, les tensions entre l'Algérie et ses voisins de l'AES demeurent réelles. La destruction du drone par l'Algérie a été considérée dans le communiqué commun aux trois pays comme une "agression visant tous les États membres de la Confédération AES".
En ligne, plusieurs comptes maliens espèrent toujours une telle fermeture de l'espace aérien par le Burkina et le Niger. "On attend les décisions de fermeture des espaces aériens du Burkina Faso et du Niger contre l'Algérie", a par exemple déclaré le compte du média Télé Mali à ses 650 000 abonnés sur Facebook le 9 avril.
Depuis le 22 décembre 2024, les trois pays ont fait de "l'espace confédéral un théâtre unique d'opérations militaires", comme l'indique une déclaration publiée ce jour-là par le collège des chefs d'État de l'AES.
Une certaine confusion entoure encore la destruction de ce drone malien par l'armée algérienne. Le drone en question a été abattu à proximité de la localité de Tinzawaten, en territoire malien, à la frontière entre l'Algérie et le Mali, dans la nuit du 31 mars au 1er avril.
Alors que les débris ont été retrouvés côté malien, le Mali accuse l'Algérie d'avoir abattu le drone alors qu'il était dans son espace aérien, tandis que l'Algérie a déclaré le 1er avril que ce dernier avait traversé la frontière et aurait pénétré deux kilomètres dans son espace aérien.
Ces informations concordent avec un témoignage recueilli par le journaliste de France 24 Wassim Nasr. La source de notre collègue aurait évoqué plusieurs avions survolant la zone en même temps que le drone.
De son côté, le magazine Jeune Afrique écrit : "L’appareil a été touché à proximité de la frontière, dans la zone d’Achibrich, où est installée une batterie de défense aérienne algérienne. Selon certaines sources, la frappe aurait eu lieu alors que le drone malien aurait débordé du côté algérien de la frontière sur plusieurs centaines de mètres."