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Stupeur à Buenos Aires après la mort mystérieuse d’un magistrat

Quelques heures avant d’être entendu par le Congrès, un magistrat, Alberto Nisman, a été retrouvé mort à son domicile. Il accusait la présidente Kirchner d’avoir fait entrave à l’enquête sur l’attentat anti-juifs de 1994 à Buenos Aires.

Il gisait dans une flaque de sang dans sa salle de bain, un revolver de calibre 22 mm près de lui, dans son appartement de Puerto Madero, un quartier chic de la capitale argentine. Alberto Nisman, ce magistrat qui accusait la présidente argentine Cristina Kirchner d'entrave au profit de l'Iran dans l'enquête sur l'attentat de la mutuelle juive AMIA (85 morts en 1994) a été retrouvé mort à son domicile à Buenos Aires, quelques heures avant de s'exprimer lundi 19 janvier au Congrès sur cette affaire.

Alberto Nisman était en charge de l'enquête depuis 2004. Deux versions s’opposent déjà : le secrétaire à la Sécurité, Sergio Berni, a estimé que le magistrat s'était probablement donné la mort, alors que l'opposition pense qu'il a été supprimé. "Tous les chemins conduisent au suicide", a dit Sergio Berni alors que la procureure Viviana Fein invitait à la prudence avant d'avoir les résultats de l'autopsie.

La disparition du magistrat, qui avait été nommé en 2004 par l’ancien président Nestor Kirchner, a choqué l'Argentine.

Double attentat en 1992 et 1994

La semaine dernière, Alberto Nisman avait demandé l'ouverture d'une enquête pour entrave contre Cristina Kirchner. Il la soupçonnait d'avoir freiné l'enquête au profit de l'Iran, afin de renouer des relations diplomatiques et commerciales avec Téhéran.

En 1994, une explosion criminelle avait ravagé le bâtiment de la mutuelle juive AMIA, tuant 85 personnes et faisant 300 blessés, dans le centre de Buenos Aires. Deux ans plus tôt, le 17 mars 1992, 29 personnes avaient péri lors d'un attentat contre l'ambassade d'Israël. Les deux attentats ayant visé la communauté juive argentine n'ont jamais été élucidés.

La justice argentine soupçonne l’Iran d’être impliqué dans ces attaques et réclame l’extradition de huit responsables iraniens. Le procureur Nisman affirmait détenir des enregistrements d'écoutes téléphoniques et accusait le pouvoir Kirchner de "protéger les fugitifs iraniens" contre de juteux contrats commerciaux avec la République islamique.

Extrême gravité de l’affaire

Le gouvernement, par la voix du ministre des Affaires étrangères Hector Timerman, avait démenti catégoriquement cette mise en cause du procureur Nisman et dénoncé une manœuvre de déstabilisation à neuf mois du premier tour de la présidentielle.

"Un procureur mort avant une présentation devant le Congrès dans une affaire de terrorisme international, c'est d'une extrême gravité", a estimé la députée d'opposition Patricia Bullrich. Mme Bullrich, consternée, a indiqué avoir parlé samedi avec le magistrat, à trois reprises.

L'Iran et l'Argentine ont signé en 2013 un mémorandum pour la mise en place d'une commission d'enquête sur l'attentat contre l'AMIA et l'audition à Téhéran des huit suspects. Cet accord est resté lettre morte.

Avec AFP