logo

La bourde de la télé iranienne qui révèle un détail sur un nouveau missile
La télévision publique iranienne a fait, le 4 mai, la promotion d’un nouveau missile en reprenant les images filmées par l’armée. Mais sur les réseaux sociaux, elle a omis de cacher le "coefficient de trainée" qui permet de quantifier la résistance de l’air qu’un objet rencontre en se déplaçant. Une information sensible, qui "pourrait être utilisée par les adversaires de l’Iran pour calibrer leurs systèmes de défense antimissile afin de mieux traquer" cette arme, explique l'expert militaire Farzin Nadimi.
Par : Alijani Ershad Suivre

C’est un nouveau missile balistique, baptisé "Qasem Basir", qui a été présenté fièrement par l’armée iranienne. D'une portée de 1 300 kilomètres, il est équipé d'une caméra qui doit lui permettre de procéder à un ciblage précis.

Dans les vidéos de propagande accompagnant sa sortie, le ministre iranien de la Défense, le général de brigade Aziz Nasirzadeh, affirme que le nouveau système de missiles a été mis au point sur la base de l'expérience acquise lors des deux récentes séries d'attaques aux missiles contre Israël, en avril et octobre 2024. "Aucun système de défense, ni Thaad ni Patriot, n'est capable d'intercepter les missiles Qasem Basir", assure-t-il.

La bourde de la télé iranienne qui révèle un détail sur un nouveau missile

À l’antenne, la télévision publique a pris soin de masquer les informations sensibles inscrites sur les images. Mais dans la version publiée sur différents réseaux sociaux iraniens, ainsi que sur Telegram, le régime a manifestement omis d’ajouter le même bandeau noir en bas de l'image, fournissant par inadvertance à ses adversaires des indications sur le comportement du missile pendant ses derniers instants et permettant une estimation plus claire de sa vitesse potentielle.

À 1 minute et 46 secondes dans la vidéo, on remarque ainsi que la bande noire est absente, ce qui révèle un symbole "D" à côté d'une séquence de chiffres décroissants allant de 3 à 1,2. Le "D" signifie "drag" en anglais, et indique le "coefficient de trainée" du missile, c'est-à-dire sa résistance à l'air , ici dans les derniers instants précédant l'impact.

via GIPHY

Pour afficher ce contenu , il est nécessaire d'autoriser les cookies de mesure d'audience et de publicité.

Accepter Gérer mes choix

"Ce n'est pas désastreux, mais cela peut permettre de "peaufiner" les systèmes défensifs"

Farzin Nadimi est expert militaire pour le Washington Institute for Near East Policy. Il explique la signification de ces chiffres :

Le "D" fait référence à la "traînée" ou à la "résistance des fluides", un terme de physique décrivant la force opposée au mouvement d'un objet dans un fluide environnant – dans ce cas, l'air. Lorsque le chiffre passe de 3 à 1,4, cela ne signifie pas que le missile accélère, mais plutôt que la vitesse à laquelle il ralentit est atténuée  [lorsque le missile rentre dans le niveau inférieur de l'atmosphère, où l'air est plus dense, le missile ralentit en raison de la résistance de l'air, NDLR].

Selon l'expert, la baisse de ce chiffre signifie en somme que la nouvelle arme iranienne est plus à même d’échapper aux systèmes anti-missiles :

Cela se produit soit lorsque l'ogive s'ajuste à un angle optimal pour réduire la résistance à l'air, soit lorsqu'elle enclenche ses moteurs de phase finale. Dans les deux cas, la manœuvrabilité du missile est améliorée, ce qui réduit le temps de réaction des systèmes de défense.

Le fait que des adversaires de l’Iran aient accès à ces données n'est pas désastreux, mais cela leur donne des indications précieuses sur les caractéristiques aérodynamiques du missile, ce qui les aidera à mieux calibrer leurs mesures de défense.

Dans l'ensemble, Farzin Nadimi estime cependant que le missile est une avancée importante pour le programme de missiles iranien :

Ces missiles tirent les leçons des précédentes attaques contre Israël. Ces attaques ont révélé que les missiles iraniens manquaient de précision à des distances supérieures à 2 000 kilomètres. Pour remédier à ce problème, l'Iran a incorporé un système de caméra permettant d'ajuster la trajectoire des missiles pour une plus grande précision, tout en dotant le missile d’un corps en fibre de carbone, une autre amélioration significative.