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Si le Front national a réussi son pari d'approcher les 600 listes pour les élections municipales des 23 et 30 mars prochains, certains candidats, parfois vulnérables, auraient été recrutés à leur insu.

À quelques jours des élections municipales, qui se tiendront les 23 et 30 mars, le Front national déchante. Alors que l’heure aurait pu être à l’euphorie, sa présidente Marine Le Pen pouvant se targuer d'avoir atteint le chiffre record de 600 communes où son parti a investi des candidats, et les sondages les plus récents annonçant que 29 % des Français se disent prêts à voter pour une liste frontiste , une affaire est venue noircir le tableau.

Des responsables locaux du FN sont en effet soupçonnés d'avoir inscrit des personnes, parfois âgées ou vulnérables, à leur insu sur plusieurs listes frontistes. C’est notamment le cas en Seine-Maritime. Selon le journal "Paris-Normandie", qui a révélé l'affaire, des cas identiques ont été dénombrés dans d'autres villes du département, comme Le Grand-Quevilly, où 22 candidats sur 35 ont demandé leur retrait des listes. Six postulants malgré eux ont porté plainte à Elbeuf, dans l'agglomération rouennaise également, trois à Harfleur, et un à Lillebonne, deux communes proches du Havre.

À Orléans, dans le Loiret, selon "La République du Centre", un couple de nonagénaires, dont l'épouse est atteinte de la maladie d'Alzheimer, a été inscrit à son insu sur la liste du FN menée par Philippe Lecoq. Dans cette même ville, des cas similaires de candidatures involontaires ont été rapportés, jeudi 6 mars. Concernant Le Grand Quevilly, le préfet de région et de la Seine-Maritime, Pierre-Henry Maccioni, a annoncé le retrait de la liste "Bleu Marine", conformément au code électoral.

"On a abusé de ma faiblesse"

L’AFP rapporte que, selon certains témoignages recueillis par les médias de la région, certains militants du FN évitent de se présenter tout de suite comme appartenant au à ce parti. Des citoyens ont signé, pensant qu’il s’agissait d’une pétition ou que cela permettrait aux militants de se présenter, sans savoir qu'elles figureraient elles-mêmes sur la liste des candidats.
"Deux personnes sont venues chez moi il y a un mois. Elles m’ont demandé si je voulais bien signer un document afin qu’elles puissent se présenter à l’élection municipale. Nous sommes en démocratie, j’ai accepté. Ensuite, c’est un ami qui s’est étonné de me voir engagé avec le FN. J’ai alors compris la supercherie", explique Jean-Pierre Verdeaux au quotidien "Paris-Normandie", surpris de sa présence sur la liste au Grand-Quevilly.
William Leroux estime, lui, aussi avoir été enrôlé contre son gré sur la liste Front national de Bruno Blondel à Lillebonne, toujours en Seine-Maritime. "J’ai été victime d’un AVC il y a peu. On est venu chez moi et on m’a fait signer des papiers, sans que je sache ce que c’est vraiment… On a abusé de ma faiblesse ", raconte-t-il à "La Voix du Nord".
Le FN rejette en bloc
Une mise en cause que le parti frontiste rejette en bloc, en affirmant que les formulaires officiels de déclaration de candidatures signés par ces personnes sont explicites. Nicolas Bay, directeur de la campagne des municipales (communes de plus de 1 000 habitants), directement concerné  par l’affaire (liste d’Elbeuf) a menacé dans un communiqué d'engager des poursuites pénales contre des maires socialistes de Seine-Maritime qui, selon lui, font pression pour que ces personnes retirent leurs candidatures.
"Dans certaines communes de Seine-Maritime [...] des maires sortants et leurs équipes organisent le démarchage systématique des candidats figurant sur les listes du Front national de leur commune dans le but de les faire renoncer à leur candidature", écrit-il.
"Abusant de leur position, ils font pression sur des personnes de condition souvent modeste. Compte tenu des témoignages nombreux et concordants de colistiers qui ont fait l'objet de ces démarches et peuvent le prouver, le Front national engagera des poursuites pénales contre ces agissements", ajoute-t-il.
Des jeunes et une centenaire
Cette affaire tombe au plus mal pour le Front national qui mise gros sur les municipales. En effet, les sondages les plus récents annoncent des victoires possibles pour les frontistes à Fréjus, Brignoles (Var), Saint-Gilles (Gard), Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) et Forbach (Moselle) notamment. Le FN ne compte pour le moment qu'une cinquantaine de conseillers municipaux, sachant qu’en 2008 il avait présenté environ 120 listes, mais espère en faire élire cette fois près de 1 000.
Mais ces affaires illustrent surtout les difficultés rencontrées par le FN à boucler ses listes. Le parti avait investi jusqu'à 800 têtes de listes, mais près d'un tiers d'entre elles ont dû renoncer, faute de trouver des candidats, à cause notamment du manque de cadres sur le terrain. Ainsi, un responsable du parti de Marine Le Pen en Haute-Savoie avait recommandé à des sympathisants hésitant à s'engager sous l'étiquette du FN de se porter candidat, "sous leur nom de jeune fille" pour les femmes ou en utilisant "leur second prénom" pour les hommes.
Enfin, le FN qui dit jouer la carte de la jeunesse présente un grand nombre de très jeunes têtes de liste, parfois à peine majeures, comme à Créteil, à Saint Cézaire et à Gosselming. A contrario, Henriette Frantz, 100 ans, se présentera, elle, à Saint-Genis-Laval, dans le Rhône.
Avec AFP