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Des familles syriennes ont commencé à franchir la frontière turque pour rentrer en Syrie, malgré la guerre. L’attentat de Reyhanli, samedi dernier, a attisé les tensions entre Turcs et réfugiés syriens dans la région frontalière du Hatay.

“Mourir là-bas ou ici, ça ne change rien.” Résignées, des familles entières de réfugiés syriens quittent la Turquie pour retourner dans leur pays avec couvertures, matelas et télévisions. Elles traversent en silence le poste frontière de Cilvegözlü. Leur départ est définitif. "Je préfère retourner dans mon pays. Il n'y a pas de meilleur endroit", justifie, laconique, un Syrien au micro de Fatma Kizilboga et Gökhan Acun, correspondants de France 24 en Turquie.

À moins de 10 kilomètres de ce poste frontière se trouve la ville de Reyhanli, secouée par un double attentat à la voiture piégée qui a tué 51 personnes et en a blessé une centaine d’autres, samedi 11 mai.

Cet attentat est imputé par Ankara à un groupuscule à la solde du régime syrien. Damas a démenti toute implication et s’est dit prêt à collaborer à une enquête conjointe.

Les relations entre les deux pays sont au plus mal actuellement. Depuis l'été 2011, la diplomatie turque condamne avec fermeté le régime alaouite, soutient les insurgés, offre une base arrière à la rébellion et accueille des centaines de milliers de réfugiés. La Turquie est le pays qui en accueille le plus - ils seraient 260 000 dans le pays selon l’ONU, 400 000 selon Ankara.

Les contre-effets de l'attentat de Reyhanli

Le double attentat de Reyhanli a tendu encore davantage les relations entre populations autochtones et réfugiés, accusés d’importer le conflit syrien en Turquie. Des voitures immatriculées en Syrie ont été saccagées. Un immeuble habité par des Syriens a été pris pour cible par des jets de pierre. Des balles à blanc ont été tirées pour forcer le départ des familles.

Le propriétaire de l’immeuble, Ramazan Yeter, s’insurge contre ces pratiques. "Ces choses-là n'auraient pas dû arriver, mais c'est ainsi. Nous allons tenter d'oublier cela. Nous avons accueilli ces Syriens dans nos maisons, nous en sommes responsables. Ils ont déjà dû fuir les bombardements, nous ne pouvons pas leur faire vivre les mêmes choses ici", dit-il à France 24.

Ankara ne semble pas pour autant être disposé à changer sa politique diplomatique et considère le Hatay, région frontalière rattachée à la Syrie jusqu'à l'accord franco-turc de juin 1939 et à laquelle Damas n'a jamais vraiment renoncé, comme un cas à part. Beaucoup de Turcs ne semblent pas suivre le gouvernement sur cette position, et à Ankara comme à Istanbul, craignent une contagion du conflit syrien à l'intérieur des frontières turques.