Cafouillage autour de l’accord qui a mis fin au conflit entre Google et les médias belges francophones : alors que Le Monde affirme que le géant de l’Internet a payé 5 millions d’euros, ses signataires contestent le versement de cette somme.
Pour certains, comme Le Monde, c’est une victoire de la presse belge francophone face à Google. Pour d’autres, à l’instar du site français spécialisé dans les tendances numériques Numerama, le géant américain de l’Internet ne s’en tire pas si mal.
Les représentants des médias francophones belges et Google ont dévoilé, mercredi 12 décembre, les grandes lignes d’un accord qui met un terme à six ans de conflit. Mais les zones d’ombre de ce compromis, qui était censé rester secret, ont ouvert la porte à des interprétations parfois contradictoires.
L’enjeu était de taille. Depuis 2006, les principaux titres belges francophones réclamaient à Google de l’argent pour l’utilisation par le moteur de recherche de leurs articles dans des services tels que Google News.
Le géant de l’Internet a toujours refusé et la bataille juridique qui faisait rage depuis lors avait abouti à une condamnation de la firme américaine aussi bien en première instance qu’en appel. En représailles, Google avait banni les titres belges de l’ensemble de ces services pendant quelques jours, en juillet 2011.
En revanche, le groupe américain a finalement renoncé à porter l’affaire devant la Cour de cassation et a préféré négocier une sortie de crise. Négociations qui ont donc abouti à l’accord d’abord révélé mercredi par Le Monde puis confirmé par les ennemis jurés d’hier... à quelques nuances prêts.
Google dans le collimateur en Europe
Car c’est dans ces nuances que l’imbroglio réside. Le célèbre quotidien du soir français affirme qu’en échange de cette paix des braves, Google a accepté de payer environ 5 millions d’euros aux médias belges qui le poursuivent. Une somme qui pourrait correspondre au règlement du contentieux sur les droits d’auteurs, laisse entendre l’article (article qui a depuis disparu du site du Monde).
Que nenni, répondent de concert le géant de l’Internet et les médias belges, bien embêtés que des détails du compromis censé rester secrets remontent ainsi à la surface médiatique.
Dans un communiqué conjoint, publié mercredi soir, pour célébrer leur amitié retrouvée, ils affirment qu’il n’y a eu que paiement des frais de justice par Google. Ils reconnaissent également qu’il subsiste des “points de vue juridiques différents”, mais se réjouissent de plusieurs projets de partenariats.
À la lecture de ces initiatives, décrites succinctement sur le blog officiel de Google France, la star du Web aurait plutôt obtenu un bon accord. En échange d’efforts plus ou moins flous que Google s’engage à faire pour promouvoir les contenus des sites belges d’information, la multinationale du clic va voir ses services (Google+, YouTube et sa régie publicitaire) davantage utilisés par lesdits médias. “Google a obtenu ce qu'il voulait. Il va payer, non pas pour indexer des contenus, mais pour accroître la visibilité de ses services sur les sites de presse, et ainsi accroître ses parts de marché sur la publicité”, analyse le site français spécialisé dans les tendances numériques Numerama.
L’absence d’une quelconque référence à la question des droits d’auteurs et d’éventuelles indemnités s’explique par le contexte européen actuellement très délicat pour le moteur de recherche. Les éditeurs de presse de cinq autres pays (Italie, Allemagne, France, Portugal, Suisse) ont, en effet, demandé à leur gouvernement d’adopter des lois qui obligeraient Google à rémunérer les médias pour l’utilisation de leur contenu sur Google actualités. Un précédent belge avéré aurait pu fournir des cartouches aux défenseurs d’une telle “Lex Google”...