
Fermée depuis le 27 janvier, la place financière égyptienne, qui a rouvert ce mercredi, a perdu 9 % dès le premier jour de cotation. Sa réouverture était autant espérée que redoutée par le nouveau pouvoir en place.
Plus d’un mois après la chute de l’ex-président égyptien Hosni Moubarak, le 11 février, la Bourse du Caire a rouvert ses portes mardi. Et la journée a été mouvementée. Trente secondes après l’ouverture, le cours était en chute libre de 10 %. Les autorités ont alors décidé d’ajourner la séance. Une demi-heure plus tard, les transactions ont pu reprendre. Finalement, au gong de fermeture, cette journée s’est achevée sur une forte baisse de 9 %.
La Bourse du Caire avait été officiellement fermée le 27 janvier alors que les manifestations en Égypte gagnaient en ampleur. La décision avait été prise après que la place financière – considérée comme l’une des plus importantes de la région – avait essuyé 12 milliards de dollars de perte en deux jours. Les autorités avaient plusieurs fois promis sa réouverture rapide avant de décider, le 2 février, de la reporter sine die.
Depuis lors, les portes closes de la Bourse du Caire étaient devenues l’un des symboles de l’instabilité dans le pays. "Cette place représente aux yeux de la population la croissance assez soutenue que le pays avait connue avant la révolution", rappelle à FRANCE 24, Jean-Noël Ferrié, directeur de recherche au CNRS, spécialiste de l'Égypte. Les nouveaux dirigeants espéraient donc voir les transactions reprendre rapidement. Il y avait maintenant urgence : si la bourse cairote ne rouvrait pas avant le 28 mars, elle risquait de perdre son statut de place financière mondiale.
Scénario à la pakistanaise
Mais l’opération était délicate. Face aux incertitudes économiques, les autorités redoutaient que les investisseurs vendent massivement leurs actions. Le risque d’un effondrement complet n’était pas négligeable. C’est ce qui avait failli se produire au Pakistan en 2008 lorsque la Bourse de Karachi, après trois mois de fermeture, avait plongé de 70 % au premier jour du retour à la normale.
EFG-Hermes, l’une des principales banques d’investissement égyptiennes redoutait le même scénario en "moins accentué". Elle estimait que "dans les prochaines semaines, la Bourse du Caire pourrait perdre 40 % de sa valeur".
Ces derniers jours, les autorités avaient d’ailleurs multiplié les déclarations pour éviter la panique boursière. "Ne perdez pas les nerfs, tous les indicateurs annoncent que l’économie est sur la voie du rétablissement", assurait ainsi le ministre des Finances Samir Radwan à la télévision publique encore quelques minutes avant le début des cotations mardi. "Le nouveau pouvoir a tout intérêt à la réouverture de la Bourse car c'est un nouveau signe de retour à la normal pour tenter de sonner la fin du mouvement social", souligne Jean-Noël Ferrié.
Le gouvernement avait cependant anticipé la chute de mercredi et pris quelques mesures préventives. La plus symbolique est la mise en place en début de semaine d’un fond de secours de 42 millions de dollars pouvant être injectés si la Bourse venait à manquer de liquidités pour faire face aux demandes de ventes d’actions.
Les autorités s’inquiètent également de la réaction du monde financier face aux procédures judiciaires à l’encontre de dignitaires de l’ancien régime. L’ex-ministre des Finances Youssef Boutros Ghali est la dernière cible en date de cette opération mains propres. Il a été accusé, mardi, de corruption par le procureur général du Caire. Des enquêtes qui risquent de ne pas plaire aux investisseurs.