Monument du football français, Just Fontaine, mort mercredi, avait un lien particulier avec le Maroc. Né à Marrakech, le recordman du Mondial-1958 y a débuté sa carrière de joueur et achevé sa carrière d'entraîneur.
Légende française par excellence, Just Fontaine, décédé mercredi 1er mars à Toulouse, rappelait souvent tout ce qu'il devait au Maroc. Un pays où le recordman de buts inscrit en une seule Coupe du monde est né, où il a joué et où il a terminé sa carrière d'entraîneur.
"Justo" a vu le jour le 18 août 1933 dans le quartier de Guéliz à Marrakech, au Maroc, encore sous protectorat de l'État français. Son père travaille comme fonctionnaire à la Régie des tabacs tandis que sa mère, d'origine espagnole, reste au foyer pour s'occuper d'une fratrie de sept.
"J'ai appris à jouer au football là-bas"
Sportif, il s’essaye aussi bien au basket-ball qu'au football. C'est finalement ce deuxième sport qui a ses faveurs. Il se rêvait relève de Larbi Ben Barek, la "perle noire", légende franco-marocaine, ayant fait carrière à la fois sous le maillot des Bleus et des Lions de l'Atlas.
"J'ai eu une enfance heureuse. J'ai appris à jouer au football là-bas", se souvenait-il en 2000 dans les colonnes du Temps.
Turbulent, il est expulsé de son lycée et passe finalement son baccalauréat à Casablanca. C'est dans cette ville aussi qu'il débute sa carrière en senior au sein de l'US Marocaine, comme une autre de ses idoles Mario Zatelli. Sous ce maillot, il inscrit 62 buts en 48 matches.
Attaquant hors-pair, Il est sélectionné plusieurs fois avec l'équipe représentant la Ligue du Maroc. Il remporte avec elle le Championnat d'Afrique du Nord en 1952. La même année, il dispute même un match face à l'équipe B de l'équipe de France, le jour de Noël. Il deviendra finalement le 1er Français du Maroc appelé en Bleu.
Il y a 70 ans, le jour de Noël 1952, l'équipe de France B affrontait la sélection Marocaine à Marseille devant 8700 spectateurs. Victoire 3-0 des Bleus. Dans l'équipe du Maroc un certain Just Fontaine. https://t.co/KGpOJMrH3T #MARFRA #FRAMAR (extrait Journal 'Combat' du 25/12/52) pic.twitter.com/IyrWpq7wgz
— Sélection A (@selectiona) December 13, 2022"Rendre ce qu’ils m’avaient donné"
Ils forgent cependant sa légende loin du Maroc, avec l'OGC Nice, puis le Stade de Reims, et surtout l'équipe de France. En Bleu, il dispute un Mondial-1958 mémorable, inscrivant 13 buts en 7 matches, un record qui tient toujours à l'heure de sa mort alors même que le nombre de matches par phase finale a augmenté.
Après une expérience désastreuse en équipe de France – il ne dirigera les Bleus que deux matches –, le Maroc devient la seule autre sélection nationale qu'il a dirigée. Il s'occupe des Lions de l'Atlas entre 1979 et 1981. Une expérience contrariée cependant : il ne mène pas en personne ses joueurs à la troisième place lors de la CAN-1980 au Nigeria en raison d'un accident de la route survenu peu avant le tournoi.
"J’ai voulu rendre ce qu’ils m’avaient donné. Si j’ai été footballeur, c’est grâce au Maroc", explique-t-il à l'Équipe à propos de cette expérience marocaine.
Défenseur de la candidature marocaine à un mondial
Tout au long du reste de sa vie, "Justo" restera un boulimique de football, capable d'en regarder pendant des heures à la télévision, du championnat de France à la CAN en passant par le football féminin. L'attaquant fut également un fervent défenseur des différentes candidatures marocaines pour organiser une Coupe du monde.
"Je suis fier de cette candidature. Il me semble que c'est au tour de l'Afrique d'organiser enfin une Coupe du monde de foot. Tous les continents ont mis sur pied cette compétition. Sauf elle", expliquait-il, alors que la Fifa allait trancher le lieu du Mondial-2006. "Le Maroc est un pays de football. Il est candidat pour la troisième fois (NDLR : après 1994 et 1998) ; le Maroc a été la première équipe africaine à se qualifier pour une phase finale (1970), la première à atteindre les 8es de finale (1986). Sur le plan de la sécurité, le roi a fait ses preuves. De même que sur le plan des droits de l'Homme."
Cette année-là, le mondial ira finalement en Allemagne. Puis, la Fifa offrira à l'Afrique du Sud l'honneur d'être le 1er pays africain à organiser la Coupe du monde (2010) tandis que l'honneur d'être le 1er pays arabe a été offert au Qatar(2022). Le Maroc attend toujours et espère pour 2030.
"Si le Maroc décrochait l'organisation de la compétition, j'aurais l'impression de marquer mon quatorzième but en Coupe du monde", expliquait-il au Temps. Cela se fera peut-être à titre posthume.