
Le dirigeant arménien du Haut-Karabakh a estimé, dimanche, que la situation était "plus calme" que la veille dans le territoire séparatiste. Mais le cessez-le-feu entré en vigueur demeure fragile, en attestent les multiples explosions à Stepanakert et les bombardements à Gandja samedi soir.
La situation reste toujours tendue dans le Haut-Karabakh, dimanche 11 octobre, malgré un cessez-le-feu entré en vigueur samedi. Araïk Haroutiounian, le dirigeant arménien du territoire séparatiste a estimé que la situation était toutefois "plus calme" que la veille.
"Hier (samedi) nous l'avons tous constaté, il n'y avait pas de cessez-le-feu. Il semble que depuis ce (dimanche) matin, c'est plus calme, mais cela peut changer très vite", a déclaré Araïk Haroutiounian, au cours d'une conférence de presse à Stepanakert, la capitale des séparatistes.
"En ce moment, il n'y a pas de bombardements en cours. Quelques échanges de tirs et de mortiers sur la ligne de front. [...] Nous verrons combien de temps cela dure. Nous ne savons pas comment va se dérouler la journée", a-t-il mis en garde, alors que Stepanakert a été la cible d'au moins trois vagues de bombardements dans la nuit.
"Tant que des tirs se poursuivent, il n'y aura pas d'échanges de prisonniers", a souligné le président Haroutiounian, pull kaki militaire sur pantalon de treillis.
Dimanche soir, l'Union européenne s'est dite "extrêmement préoccupée" par les violations de la trêve humanitaire.
"Nous prenons note avec une extrême préoccupation de rapports faisant état de la poursuite des activités militaires, notamment contre des cibles civiles, et de victimes civiles", a déclaré le chef de sa diplomatie, Josep Borrell, dans un communiqué.
Les 27 pays membres de l'Union "demandent instamment à toutes les parties de respecter l'accord (de cessez-le-feu) sur le terrain", a-t-il ajouté. Josep Borrell a par ailleurs demandé aux parties en conflit "d'engager sans délai de réelles négociations sous les auspices" du groupe de Minsk de l'OSCE (Russie, France, États-Unis).
La trêve, négociée à Moscou vendredi, visait l'organisation d'un échange de prisonniers et de corps de militaires tués. Le Comité international de la Croix-Rouge a dit se tenir à disposition pour organiser cet échange.
Des frappes nocturnes sur la ville azerbaïdjanaise de Gandja
L'Azerbaïdjan a, pour sa part annoncé, que neuf civils avaient été tués par des frappes nocturnes sur la deuxième ville du pays, Gandja. La ville située une soixantaine de kilomètres du front a été visée à plusieurs reprises depuis une semaine.
Le bureau du procureur général a indiqué que c'était un immeuble d'appartements qui avait été touché, dénonçant une attaque "délibérée contre la population civile".
Sur place, des sauveteurs fouillaient dimanche matin à mains nues les décombres d'un immeuble, ont constaté des journalistes de l'AFP, qui ont vu deux corps sortis des gravats.
Hikmet Hajiyev, conseiller du président azerbaïdjanais Ilham Aliev, a dénoncé "un acte de génocide", et prévenu que "si ça continu(ait), nous serons obligés de prendre des mesures de réciprocité".
"Efforts en faveur du retour de la paix"
Le ministère de la Défense des séparatistes arméniens du Haut-Karabakh a démenti avoir bombardé Gandja : "C'est un mensonge absolu".
Araïk Haroutiounian a aussi réaffirmé lors de sa conférence de presse que tous les Arméniens exerceraient leur "droit à l'auto-défense" en cas d'attaque azerbaïdjanaise, assurant respecter pour sa part le cessez-le-feu. Le dirigeant séparatiste a par ailleurs prévenu qu'en cas de poursuite du conflit, il demanderait à l'Arménie de reconnaître l'indépendance de son territoire, ce qui ne manquerait pas d'envenimer le conflit avec l'Azerbaïdjan.
"L'Artsakh (nom arménien du Haut-Karabakh, NDLR) ne fera jamais partie de l'Azerbaïdjan", a prévenu le chef des séparatistes, 47 ans, à la mâchoire carrée et aux fines lunettes, qui chaque jour s'affiche aux côtés de ses soldats sur la ligne de front. "L'Azerbaïdjan utilise des roquettes Smertch, Polonez, des drones, contre les populations civiles de l'Artsakh", a-t-il dénoncé.
Fustigeant la "coalition internationale terroriste" constituée selon lui par Bakou et la Turquie, il s'est félicité de "la mobilisation et de la solidarité" de l'Arménie et de la diaspora. Il a aussi remercié le président russe Vladimir Poutine pour "ses efforts en faveur du retour à la paix", Moscou ayant parrainé les négociations ayant abouti à un accord de trêve.
À propos d'éventuelles négociations de paix à venir avec Bakou, le président indépendantiste a exprimé toute sa méfiance, accusant l'Azerbaïdjan d'avoir "pour objectif le génocide de toute notre nation, notre peuple, notre culture, notre histoire".
Le Haut-Karabakh a fait sécession de l'Azerbaïdjan, provoquant une guerre au début des années 1990, qui fait quelque 30 000 morts. Malgré trente ans de médiation internationale, aucune résolution négociée du conflit n'est jamais intervenue.
Avec AFP