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Grève générale en Irak, les syndicats appellent à la chute du régime

Routes coupées, écoles et administrations à Bagdad fermées dimanche : le mouvement de contestation se durcit. Les syndicats ont appelé à la grève pour faire tomber le régime en place. À Kerbala, quatre manifestants ont été tués dans la nuit.

La désobéissance civile se poursuit en Irak. Les syndicats des enseignants, des ingénieurs, des médecins et des avocats ont appelé à une grève générale dimanche 3 novembre, paralysant la plupart des écoles publiques et des administrations de Bagdad et du sud du pays.

Sur la place Tahrir, épicentre de la contestation dans la capitale, les manifestants s'organisent. Dans les dizaines de tentes, les Irakiens proposent des soins médicaux, des conseils juridiques, des fournitures ou plats chauds. Tout est proposé gratuitement. "Tout est fourni par des Irakiens. Quand j'appelle mes amis et que je leur dis que j'ai besoin de soutien, le soutien arrive, explique à France 24 Ayad Kadhim Muhsen, bénévole. Malgré toutes les ressources de l'État, le gouvernement n'a pas ce que nous avons."

La place Tahrir est devenue l'État-modèle auquel aspirent les Irakiens. La contestation, née le 1er octobre, a été marquée par des violences meurtrières qui ont fait, officiellement, au moins 260 morts. Quatre manifestants ont été tués par balles lors de violences dans la nuit de dimanche à lundi aux abords du consulat iranien de Kerbala, au sud de Bagdad, selon des cadres de la médecine légale.

Les promesses d'élections anticipées, de réformes du système des embauches et des retraites, n'ont en rien apaisé la colère des Irakiens.

Impact économique important

Depuis plusieurs jours, des manifestants bloquent égalmement la route menant au port d'Oum Qasr (sud), suscitant l'inquiétude des autorités pour les importations, notamment alimentaires. Des dizaines de bateaux ont repris la route sans avoir pu décharger leurs cargaisons, selon l'AFP.

Signe que les autorités s'inquiètent d'un impact économique important, le Premier ministre Adel Abdel Mahdi est sorti de son silence dimanche soir, assurant que "de nombreuses revendications ont déjà été satisfaites" et qu'il faut maintenant "retourner à la vie normale".

Une militante enlevée

Cette mobilisation inédite est menacée par une campagne d'intimidation et des violences, régulièrement dénoncée par la communauté internationale et les défenseurs des droits humains. Des médias ont été attaqués, des blogueurs et des militants enlevés et plusieurs figures ont dénoncé une "nouvelle République de la peur".

Dimanche, la Commission gouvernementale des droits humains a annoncé l'enlèvement de la militante et médecin Saba Mahdaoui, dénonçant "des opérations d'enlèvement organisées", alors qu'une autre militante vient tout juste d'être libérée.

La mère de cette dernière et des militants ont affirmé qu'elle avait été kidnappée par des hommes "armés et masqués à bord de pick-up" alors qu'elle revenait de Tahrir dans la nuit de samedi à dimanche. "C'est une honte pour toute la société irakienne", a dénoncé le chef de la Commission parlementaire pour les droits humains.

Violences nocturnes

L'ancien Premier ministre Iyad Allaoui a, lui, ironisé sur le fait que "ceux qui ont pu localiser le chef du groupe État islamique (EI) Abou Bakr al-Baghdadi ne parviennent pas à localiser Saba Mahdaoui et à savoir qui l'a enlevée".

Sur Tahrir, des violences nocturnes ont de nouveau fait un mort, selon des sources médicales, ainsi que des dizaines de blessés.

Si aucun tir à balles réelles n'y a plus lieu – comme cela avait été le cas début octobre –, les forces déployées tirent en direction des manifestants des grenades lacrymogènes dix fois plus lourdes qu'ailleurs dans le monde et qui peuvent fendre des crânes et briser des os, selon Amnesty International.

Avec AFP