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L’acte d’accusation américain contre Huawei, publiée lundi, souligne le rôle crucial joué par une petite structure hongkongaise très opaque, Skycom, dans les faits reprochés au géant chinois.
Son nom est omniprésent dans l’acte d’accusation du département américain de la Justice contre le géant chinois Huawei, dévoilé lundi 28 janvier. La société hongkongaise Skycom apparaît au cœur du dossier monté par Washington contre le premier fabricant mondial d’électronique, sur fond de conflit commercial sino-américain.
Cette entité est accusée d’avoir violé l’embargo américain sur les exportations vers l’Iran, d’avoir commis des fraudes bancaires et d’avoir blanchi de l’argent. Huawei, de son côté, aurait menti à la justice américaine sur le lien qui l’unit à Skycom. Présentée depuis des années comme un simple partenaire commercial, il s’agirait d’une filiale du géant chinois, créée dans le but précis de cacher ses pratiques illégales, affirment les Américains.
Des îles Vierges britanniques à l’île Maurice
Inconnue du grand public, Skycom est soupçonnée depuis longtemps d’être l’entité de l’ombre de Huawei. Fin 2012, elle avait déjà été accusée d’avoir cherché à vendre, pour plusieurs millions de dollars, des ordinateurs HP à l’Iran en violation de l’embargo américain. Un rapport du FBI, publié en 2015, s’interroge aussi sur les liens entre Huawei et Skycom, qui est soupçonné de mener des activités illégales à Téhéran. Le nouvel acte d’accusation du département américain de la Justice complète le tableau, évoquant plus de 100 de dollars de transactions douteuses qui violent potentiellement l’interdiction d’exporter du matériel américain vers l’Iran.
Le lien juridique entre Huawei et Skycom est donc crucial pour l’affaire. S’il s’agit d’une filiale, le géant chinois peut être tenu pour responsable de ces infractions aux lois américaines. Établie en 1998 avec pour objectif de faire des affaires en Iran, Skycom s’est toujours distinguée par son opacité. Elle a changé de propriétaires à de multiples reprises au cours de son histoire, passant de deux sociétés écrans basées aux îles Vierges britanniques à une autre à Hong Kong avant d’être reprise par une structure enregistrée à l’île Maurice.
Cet écran de fumée juridique ne dissimule pourtant qu’imparfaitement les liens qui unissent Skycom à Huawei. Meng Wanzhou, la fille du fondateur d’Huawei arrêtée au Canada le 7 décembre 2018, a été l’une des directrices de l'entité qui contrôlait Skycom à la fin des années 2000. Deux autres employés du géant chinois ont pu être identifiés comme d’anciens directeurs de la société par les enquêteurs américains.
"Huawei Iran"
Au delà des personnes impliquées, d’autres indices vont dans le même sens. Ainsi, Skycom a été désignée comme "Huawei Iran" dans un communiqué de presse de 2009 de l’ambassade chinoise à Téhéran, relatif à un accord de coopération entre l’Université de Téhéran et le géant chinois. Les employés de Skycom à Téhéran ont été vus avec des badges d’identification Huawei, avait raconté Reuters dans une enquête de 2013 consacrée à la mystérieuse société. Enfin, un audit sur les activités iraniennes de Skycom, préparé en 2010 par le cabinet britannique International Company Profile, présentait cette société comme une filiale de Huawei.
Huawei est donc dans le collimateur des autorités américaines depuis longtemps pour ses liens commerciaux avec l’Iran. Cela n’a pas empêché Pékin de contester, mardi 29 janvier, les conclusions du département de la Justice et de dénoncer un procès "politique" fait à son fleuron de l’électronique. Certes, l’acte d’accusation repose essentiellement sur des faits connus de longue date et le conflit commercial sino-américain peut avoir joué le rôle de déclencheur pour passer à l’offensive. Ce qui n’exonère pas, pour autant, Huawei de ses responsabilités.