Des chercheurs ont développé une intelligence artificielle capable de reconnaître une personne même lorsqu'une partie de son visage est masquée. Un progrès technologique qui met en péril l'anonymat lors de certains événements publics.
Difficile de s'enthousiasmer pour la reconnaissance faciale, quand chaque actualité en lien avec cette technologie est assortie d'une menace pour nos libertés individuelles.
Une équipe de chercheurs britanniques et indiens de l'université de Cambridge, du National Institute of Technologie de Warangal et de l'Indian Institute of Science, a développé un système de reconnaissance faciale capable d'identifier des visages partiellement dissimulés. Leur étude a été publiée le 30 août sur la plateforme Arxiv.
ohai a machine learning system that can identify ~69% of protesters who are wearing caps AND scarfs to cover their face. h/t @jackclarksf pic.twitter.com/ct3NvBL2BW
— Zeynep Tufekci (@zeynep) 4 septembre 2017
Grâce au deep learning, l'intelligence artificielle identifie 14 points sur un visage et mesure la distance entre ces différents points afin d'identifier la personne, et de pouvoir la retrouver sur d'autres images grâce à ces calculs.
Reconnaître des personnes masquées
Le système a été entrainé grâce à deux bases de données de 2 000 images chacune, la première contenant des portraits simples de personnes, la deuxième des images plus complexes, contenant par exemple plusieurs personnes avec des visages partiellement dissimulés.
Son taux de réussite est de 53 %, même en incluant les personnes masquées. Comme le souligne The Next Web, elle n'est pas encore totalement au point car ce taux chute assez vite à 43 % quand la personne porte des lunettes – il paraît que ça transforme un visage.
Un danger relatif pour les manifestants et dissidents
Les créateurs de ce système eux-mêmes avertissent sur les dangers d'une telle technologie si elle devait être placée entre de mauvaises mains. Une telle intelligence artificielle pourrait en effet permettre d'identifier des manifestants surveillés ou des dissidents politiques. Mais Amarjot Singh, auteur principal de l'étude, pense tout de même qu'il y a "plus de bénéfices que de nuisances à tirer de cette technologie". "Tout peut-être utilisé d'une bonne ou d'une mauvaise manière, même une voiture", ajoute-t-il, cité par The Verge, sans pour autant s'étendre sur les usages positifs de ce système.
Selon d'autres chercheurs, cette intelligence artificielle n'est pas menaçante pour les libertés individuelles. "Le système ne fait pas directement correspondre des visages masqués à d'autres portraits", explique Patrik Huber à The Verge, "il utilise des points-clés faciaux pour identifier la personne". Une autre technologie, développée par des chercheurs de l'université suisse de Bâle, est plus pertinente et dangereuse en ce qu'elle recrée un modèle 3D du visage grâce à la matière photographique qu'on lui donne.
Bernhard Egger, auteur principal de cette étude, est pourtant le premier à dire que l'homme pourra toujours tromper la machine. "Les machines vont peut-être dépasser l'humain sur des tâches spécifiques, mais il sera toujours possible de ne pas être reconnu si on le souhaite".
Cela peut se faire par exemple en portant des masques rigides ou des accessoires conçus exprès, comme ces lunettes censées tromper et embrouiller l'intelligence artificielle. Une catégorie d'objets qui risque de connaître un succès grandissant, tandis qu'autour de nous la reconnaissance faciale prend de l'ampleur, tant pour identifier ses amis sur des photos Facebook, trouver l'âme sœur ou, moins sympathique, surveiller les étudiants distraits en cours et traquer des criminels.
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