Le scandale des œufs contaminés à un insecticide potentiellement dangereux pour l’homme met l’Allemagne en émoi depuis quelques jours. Mais d’autres pays sont aussi concernés dont la France. Retour sur une nouvelle affaire de sécurité alimentaire.
Depuis vendredi 4 août, la chasse aux œufs contaminés est ouverte dans plusieurs pays européens. En Allemagne, les autorités sanitaires ont estimé, ce week-end, qu’environ 10 millions de ces œufs contenant des traces de fipronil, un insecticide potentiellement dangereux pour l’homme, ont été vendus. Un chiffre qui pourrait monter à plus de 100 millions en y ajoutant les Pays-Bas, la Belgique et la Suisse ou encore la Suède. Après avoir affirmé que la France n'était pas concernée hormis un élevage dans le nord qui a dû stopper sa production, le ministère de l’Agriculture a finalement annoncé que treize lots avaient été livrés à deux établissements de fabrication de produits à base d'oeufs de la Vienne et du Maine-et-Loire en juillet.
C’est en Allemagne, où les habitants mangent cinq œufs par semaine en moyenne, que le scandale a pris le plus d’ampleur. Débat public, ouverture d’une enquête judiciaire, clients qui rapportent leurs œufs au supermarché et grandes enseignes du hard-discount qui les retirent "préventivement" des rayons : l’Allemagne en fait tout un plat. Une appli pour smartphone - Faules Ei (œuf pourri) - permet même de vérifier si les œufs appartiennent à des lots dont la contamination est avérée.
Chickfriend ou Poultry-Vision ?
L’origine de cette affaire remonte au Pays-Bas… ou bien à la Belgique. C’est toute la question que les autorités européennes, qui “suivent l’affaire de près”, voudraient trancher. Face à des problèmes récurrents de poux rouges, des éleveurs hollandais de poulets se sont tournés vers une jeune entreprise fondée en 2014, Chickfriend, qui semble détenir un produit miracle. Elle fournit à ses clients un insecticide classique dans ces cas-là, le Dega-16, constitué d’eucalyptus et de menthol, pour nettoyer les élevages. Et leur solution fonctionne bien mieux que celles des concurrents. Interrogé par un éleveur sur les raisons de ce succès, Chickfriend lui oppose le “secret industriel”, rapporte le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung.
Il s’agit en fait du fipronil, un insecticide utilisé pour combattre les parasites notamment chez le chien et le chat, mais qu’il est interdit d’appliquer sur des animaux qui pourraient se retrouver dans la chaîne alimentaire. Leur consommation par l’homme peut, dans certains cas rares, nuire à la santé.
Ce que Chickfriend peut avoir ignoré. Leur fournisseur de Dega-16, l’entreprise belge Poultry-Vision était, elle, en revanche au courant. En juin, des cas de contamination d’œufs au fipronil avaient été constatés dans le royaume. Le 20 juillet, les enquêteurs belges ont retrouvé 6 000 litres de cet insecticide, directement importés de Roumanie, dans les entrepôts de Poultry-Vision. Le gérant de la société a reconnu avoir vendu des produits contenant cette substance, mais s’est défendu arguant qu’il n’avait pas à informer ses clients des restrictions réglementaires qui pèsent sur cet insecticide.
Des œufs partout
Le scandale de l’œuf contaminé n’a pas encore pris la dimension des affaires de la vache folle ou de la viande de cheval qui avaient mis l’Europe en émoi. Le niveau de dangerosité du fipronil n’est d’ailleurs pas clairement établi. Les autorités sanitaires allemandes rappellent que les expériences menées sur le rat ont montré qu’à forte dose, cet insecticide pouvait endommager le foie et le système nerveux.
Un adulte devrait manger plus d’une vingtaine d’œufs contaminés en moins de 24 heures avant d’atteindre un seuil dangereux pour la santé. Un enfant en école élémentaire n’a rien à craindre tant qu’il ne dépasse par les neuf œufs par jour. En revanche, un bébé peut ressentir des effets après en avoir ingéré seulement 1,7. Rien n’indique toutefois qu’une fois dépassée la dose limite, les effets néfastes se déclenchent automatiquement.
Mais, comme le souligne le quotidien Die Welt, le scandale n’en est peut-être qu’à ces débuts. L’une des particularités du Finopril est qu’il résiste aux fortes températures et donc à la cuisson. Des produits à base d’œufs, comme les gâteaux, certaines pâtes, les quiches, la mayonnaise et des desserts, pourraient rapidement devenir de nouveaux foyers de contamination.