Israël a entamé mercredi l'évacuation d'une colonie emblématique de Cisjordanie mais a annoncé en compensation la construction de 3 000 logements supplémentaires dans ce territoire palestinien occupé.
Des centaines de policiers sont montés en file indienne, à pied et apparemment sans armes, sur la colline où se trouve la colonie israélienne d’Amona, mercredi 1er février, afin d'en évacuer ses résidents. Au cœur de la Cisjordanie, près de Ramallah, le village est l’enjeu d'une bataille politique et légale depuis 2014. Il est voué à la démolition sur décision de la Cour suprême israélienne, qui a jugé la colonie illégale au regard du droit israélien parce que construite sur des terres privées palestiniennes.
Les 200 à 300 habitants ont jusqu'alors refusé de partir de leur plein gré. Selon eux, toute la Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, appartient à la terre biblique d'Israël et ils sont trahis par leur propre gouvernement. La plupart des habitants, vivant dans quelques dizaines de préfabriqués devenus des maisons permanentes, ont promis de résister, mais sans violence. Des dizaines d'adolescents des colonies voisines ont trompé les barrages policiers mardi soir et sont montés sac au dos sur la colline pour s'opposer à l'évacuation, au nom de la souveraineté israélienne qu'ils proclament. Les policiers n'ont cependant pas rencontré de résistance physique dans un premier temps, en dehors de quelques jets de pierres des adolescents. La Cour suprême a donné aux autorités jusqu'au 8 février pour vider Amona. Mardi, les autorités ont accordé aux colons 48 heures pour s'exécuter.
"L’affaire de cette évacuation est hautement symbolique, Amona est dans tous les esprits en Israël comme l’emblème des colonies dites ‘sauvages’. Toutes les implantations israéliennes sont, au regard du droit international, interdites et condamnées. Mais Amona est, comme une centaine d’autres colonies, un avant-poste de la colonisation sauvage interdite aussi au regard du droit israélien", explique Cyril Payen, correspondant de France 24 en Israël, qui rapporte que l’évacuation tourne au "psychodrame national".
3 000 nouveaux logements
La décision a été compensée par l’annonce, dans la nuit de mardi à mercredi, de la construction de 3 000 logements supplémentaires dans ce territoire palestinien occupé. Ils ressemblent à un gage de plus donné aux partisans de la colonisation. Si les autorités israéliennes n'avaient plus d'autre choix que d'évacuer Amona, elles se sont engouffrées dans l'espace ouvert par l'avènement de Donald Trump, jetant aux orties la relative retenue observée dans leurs activités de colonisation au cours des dernières semaines de la présidence de Barack Obama.
"Nous construisons et nous continuerons à construire", a promis le Premier ministre Benjamin Netanyahou, qui ne cache pas que la présidence Trump représente une "chance formidable" après les "pressions énormes" de l'administration Obama sur la colonisation. Depuis le 20 janvier et la prestation de serment du nouveau président américain, Israël a annoncé la construction de plus de 6 000 logements en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, annexée et occupée.
La communauté internationale et les Palestiniens s'alarment de cette rafale d'annonces. Nabil Abou Roudeina, porte-parole de la présidence palestinienne, a dénoncé une "campagne féroce de colonisation israélienne violant le droit international". La direction palestinienne a lancé en urgence des consultations, a-t-il dit. Il en a aussi appelé à la nouvelle administration américaine pour qu'elle freine cette politique visant à "détruire le processus de paix".
Federica Mogherini, chef de la diplomatie de l'Union européenne, a averti mercredi qu’en poursuivant la colonisation, le gouvernement israélien mettait "directement" en péril la perspective d'un règlement du conflit israélo-palestinien, la solution à deux États risquant même de "devenir impossible". Environ 400 000 colons israéliens mènent une coexistence souvent conflictuelle avec 2,6 millions de Palestiniens en Cisjordanie.
Avec AFP