Trente-et-un détenus ont été brutalement assassinés, vendredi, dans l´État de Roraima. Un nouveau massacre dans une prison du nord du Brésil, cinq jours après le carnage de Manaus en Amazonie, qui avait fait 56 morts.
Des membres du plus puissant gang de narcotrafiquants du Brésil, le Premier Commando de la Capitale (PCC) ont massacré 31 codétenus dans la prison de Monte Cristo, dans le Roraima, l'État le plus au nord du Brésil. Ils ont décapité et arraché le cœur de la plupart de leurs victimes avant de brûler leurs corps.
Dans une vidéo tournée avec un téléphone portable pendant le massacre et diffusée sur les réseaux sociaux, les meurtriers se réclamant du PCC disent venger la mort de membres de leur cartel, lundi, à la prison Anisio Jobim, à Manaus, dans l'État voisin d'Amazonas, où des violences ont fait 56 morts.
"Vous avez tué nos frères, n'est-ce pas ? Regardez, voilà ce qui va vous arriver", dit l'un d'eux devant une pile de corps ensanglantés.
Le massacre s'est déroulé dans la plus grande centrale pénitentiaire du Roraima. Les forces d'élite de la police ont fini par en reprendre le contrôle. Dans cette même prison, des violences entre bandes rivales de narcotrafiquants avaient fait dix morts au mois d'octobre.
Selon le chef de la sécurité de l'État de Roraima, Uziel de Castro, la plupart des hommes tués vendredi ne faisaient cependant pas partie du gang de la Famille du Nord qui a attaqué les détenus du PCC, lundi, à Manaus. Pour le ministre brésilien de la Justice, Alexandre Moraes, il s'agirait plutôt d'une lutte interne au PCC sans relation avec le massacre de lundi. Le Brésil contrôle ses prisons, a-t-il insisté.
Au total, 91 prisonniers ont été tués dans trois mutineries cette semaine au Brésil. Certains craignent que les prisons, dont un grand nombre sont contrôlées par les cartels de la drogue, ne deviennent hors de contrôle.
Rupture d'alliance entre les gangs
Lors des émeutes de lundi, des membres du PCC ont été attaqués par des membres de la Famille du Nord qui contrôle la prison Anisio Jobim, ont indiqué les autorités, selon lesquelles la Famille du Nord dirigerait le trafic de cocaïne en provenance de Colombie et du Pérou dans l'Amazonas.
Ce groupe était allié avec le Comando Vermelho (Commando rouge) basé à Rio de Janeiro, numéro deux de la drogue au Brésil derrière le PCC. Pendant plus de 20 ans, le PCC et le Comando Vermelho se sont plus ou moins mis d'accord pour que le trafic d'armes et de drogue puisse se poursuivre sans heurts dans la jungle, le long de la frontière. Mais, il y a environ six mois, les deux groupes se sont séparés, le PCC prenant le dessus pour contrôler les flux en provenance du Paraguay.
Selon certains spécialistes, le PCC voudrait s'infiltrer à Rio de Janeiro, qui est la base du Comando Vermelho et cette guerre des territoires pourrait se poursuivre dans les rues des plus grandes villes du Brésil.
Depuis la séparation, le Comando Vermelho s'est allié avec de petits gangs régionaux pour pouvoir affronter le PCC, surtout dans le nord et le nord-est du Brésil, où se sont déroulées les dernières violences.
Rafael Alcadipani, un expert de la sécurité qui travaille à la fondation Getulio Vargas à Sao Paulo, souligne que comme le système carcéral brésilien était "autorégulé" par les gangs, en raison de la trêve qui était observée, les massacres étaient rares jusqu'à ces derniers mois. Il dit craindre désormais que la situation ne dégénère.
"Le gouvernement ne peut rien faire à court terme pour stopper la violence", estime-t-il. "Nous payons le prix de 50 ans d'incurie du système pénitentiaire".
Avec AFP et Reuters.