logo

En cas de démission d’Emmanuel Macron, comment se déroulerait la présidentielle anticipée ?
L’idée d’une démission du président de la République a gagné davantage de terrain depuis que l’ancien Premier ministre Édouard Philippe a appelé mardi matin Emmanuel Macron à annoncer son départ – un départ différé, une fois le budget 2026 adopté. France 24 répond aux questions soulevées par l’idée d’une élection présidentielle anticipée.
Le président français Emmanuel Macron et le maire du Havre Édouard Philippe, le 12 septembre 2024 lors d'une cérémonie commémorant le 80e anniversaire de la libération du Havre. © Benoît Tessier, AFP

La pression monte sur Emmanuel Macron avec de plus en plus de voix appelant à sa démission. La dernière en date n’est autre que celle de son ancien Premier ministre Édouard Philippe (2017-2020), qui a appelé le président de la République, mardi 7 octobre sur RTL, à organiser "une élection présidentielle anticipée" après l’adoption du budget 2026.

Face à "l'affaissement de l'État" qui n'"est plus tenu" selon le patron du parti Horizons, "la sortie de crise, c'est sur lui qu'elle repose". "On ne va pas faire durer ce que nous vivons depuis six mois pendant 18 mois encore, c'est beaucoup trop long", a-t-il estimé, évoquant un "jeu politique affligeant".

"Face à cette mise en cause terrible de l'autorité de l'État, il doit prendre la décision qui est à la hauteur de sa fonction, celle de garantir la continuité des institutions en partant de façon ordonnée", a encore jugé Édouard Philippe, qui ajoute sa voix à celles de Jean-Luc Mélenchon, Jean-François Copé, David Lisnard, Dominique de Villepin ou Marine Le Pen.

Si elle paraît difficile à imaginer tant Emmanuel Macron, dont le mandat court jusqu'en mai 2027, a maintes fois répété qu’il était hors de question pour lui de démissionner, l’hypothèse est de plus en plus crédible, en particulier depuis la déclaration d’Édouard Philippe. Comme lui, les Français sont 70 % à demander la démission du chef de l’État, selon un sondage Odoxa publié lundi 6 octobre dans Le Figaro.

Que se passerait-il en cas de départ du président de la République ? France 24 fait le point.

  • Quelles sont les modalités d’une démission du président ?

Le président de la République est libre de démissionner quand bon lui semble. Il doit pour cela envoyer un courrier formel au Conseil constitutionnel, qui acte sa démission et constate la vacance du pouvoir.

Selon l’article 7 de la Constitution, "en cas de vacance de la présidence de la République pour quelque cause que ce soit, ou d'empêchement constaté par le Conseil constitutionnel saisi par le gouvernement et statuant à la majorité absolue de ses membres", les fonctions du président de la République "sont provisoirement exercées par le président du Sénat".

C’est donc Gérard Larcher, actuel président Les Républicains du Sénat, qui serait alors chargé d’assurer l’intérim.

  • Comment serait élu son successeur ?

Une élection présidentielle anticipée serait convoquée dans la foulée de la démission du président.

"En cas de vacance ou lorsque l'empêchement est déclaré définitif par le Conseil constitutionnel, le scrutin pour l'élection du nouveau président a lieu, sauf cas de force majeure constaté par le Conseil constitutionnel, vingt jours au moins et trente-cinq jours au plus après l'ouverture de la vacance ou de la déclaration du caractère définitif de l'empêchement", selon l’article 7 de la Constitution.

Le début de la campagne lancerait alors "toutes les règles de financement, de temps de parole médiatique, de recueil des parrainages, de déclaration des candidatures officielles", décrit la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina, interrogée par l’AFP.

En clair, si Emmanuel Macron annonçait sa démission mercredi soir – le président de la République a donné au Premier ministre démissionnaire Sébastien Lecornu 48 heures, jusqu'au mercredi 8 octobre au soir, pour mener "d'ultimes négociations" – et que la vacance du pouvoir était constatée le lendemain par le Conseil constitutionnel, une élection présidentielle anticipée devrait alors être organisée au plus tôt le 28 octobre et au plus tard le 12 novembre prochains.

  • Y a-t-il déjà eu un précédent ?

Dans l’histoire de la Ve République, il existe un seul précédent de démission d’un président de la République : celui de Charles de Gaulle, le 28 avril 1969, après son référendum perdu sur la création des régions et la réforme du Sénat.

L’intérim est alors assuré par le président du Sénat, Alain Poher (Centre démocrate), et une élection présidentielle anticipée est convoquée pour les 1er et 15 juin 1969. Le Premier ministre Georges Pompidou et le président du Sénat Alain Poher accèdent au second tour. C’est finalement Georges Pompidou qui est élu président de la République.

Le décès de ce dernier provoquera une autre élection présidentielle anticipée en 1974.

  • Emmanuel Macron peut-il annoncer une démission différée ?

La proposition d’Édouard Philippe de programmer la démission d'Emmanuel Macron pour début 2026 n’est pas prévue par la Constitution. "C'est absolument impossible de démissionner en deux temps et de considérer qu'on va lancer une campagne présidentielle en annonçant sa démission", affirme Anne-Charlène Bezzina.

Rien n’empêche toutefois Emmanuel Macron de le faire, mais cela signifierait qu’une précampagne serait alors lancée, dans l’attente de la vraie campagne officielle, qui ne pourrait être déclenchée que par la démission effective du chef de l’État.

Pour Anne-Charlène Bezzina, le risque est d’avoir une campagne "complètement inéquitable". "Cela va amener des inégalités, avec des primes aux sortants ou à ceux qui ont déjà une très forte présence médiatique", selon elle. "Cela va être un embrouillamini absolu, puisque vous allez avoir des recours tous les quatre matins en disant 'J'ai eu moins de temps [de parole] qu'untel, pourtant je suis véritablement candidat', 'Comment on finance ça', etc.", poursuit la constitutionnaliste.

Des arguments qui peuvent toutefois être déjà avancés en temps normal. Si, par exemple, l'égalité du temps de parole entre candidats est garantie dans les deux dernières semaines que dure la campagne officielle avant le premier tour, ce n'est pas le cas lors des semaines et des mois qui précèdent.