
Les principaux points de l'accord entre le pouvoir et l'opposition, qui doit être signé vendredi, prévoient la tenue d'une élection présidentielle fin 2017, à laquelle le président sortant Joseph Kabila n'est pas censé participer.
Médiateurs de la crise politique en République démocratique du Congo, les évêques catholiques affichent une certain optimisme : "C'est sûr, nous terminerons demain [vendredi], a déclaré jeudi 21 décembre dans la soirée Mgr Fridolin Ambongo, vice-président de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco). Les pourparlers ont débuté le 8 décembre en vue d'instaurer une transition politique pacifique.
L'oppposition semble également rassurante sur une éventuelle sortie de crise. "Nous avons obtenu tout ce que nous voulions", a confié une source dans l'opposition. "Normalement, l'accord sera signé demain vendredi", a ajouté Étienne Tshisekedi, chef de la délégation de l'opposition à l'issue d'une séance plénière. De son côté, le négociateur de la majorité Adolphe Lumanu Mulenda a estimé que "le président a[vait] fait suffisamment de concessions, [et que] l'accord sera[it] signé demain".
#RDC Le rapporteur énumère tous les membres du nouveau gouvernement. pic.twitter.com/iYpCww5d9k
— Thomas Nicolon (@ThomasNicolon) 22 décembre 2016Kabila ne briguera pas de troisième mandat
"Majorité et opposition ont su faire des concessions, confirme le correspondant de France 24 à Kinshasa, Thomas Nicolon. L'accord devrait être finalisé cet après-midi". Le temps que les juristes de chaque camp finalisent la rédaction de l'accord.
Le texte prévoit l'instauration d'une "transition politique" et la tenue "fin 2017" de la présidentielle, qui aurait dû être organisée cette année et que le pouvoir disait jusque-là ne pas pouvoir organiser avant avril 2018. L'opposition obtient également la garantie que le président Joseph Kabila ne briguera pas de troisième mandat, conformément à la Constitution. Un "Conseil national de transition" doit également être créé afin de veiller à la bonne exécution de l'accord, particulièrement sur les questions électorales.
En contrepartie, l'opposition, rassemblée autour de la figure historique d'Étienne Tshisekedi, a accepté le principe du maintien au pouvoir de Joseph Kabila jusqu'à une passation de pouvoir avec un successeur élu, alors qu'elle demandait jusque-là son retrait immédiat de la vie publique.
Âgé de 45 ans, Joseph Kabila est au pouvoir depuis 2001. Son second mandat s'est achevé mardi dans un climat de violence, et la Constitution lui interdit de se représenter.
Violences meurtrières
Cet accord pourrait mettre un terme aux vives tensions qui pèsent sur la population depuis lundi 19 décembre, date à laquelle le mandat du président a expiré. En cinq jours, entre 56 et 104 personnes, selon les sources, ont péri dans des violences politiques ou interethniques. Ces chiffres ne tiennent pas compte d'affrontements au bilan encore inconnu mardi dans la ville de Kananga (centre) entre forces de l'ordre et une milice opposée au gouvernement central.
Mardi, des affrontements entre forces de l'ordre et jeunes contestant sa légitimité ont fait 20 morts à Kinshasa, Lubumbashi (deuxième ville du pays) et dans deux villes de l'Ouest, selon la police. L'ONG Human Rights Watch affirme avoir documenté le décès de 34 personnes dans ces violences. L'ONU, elle, avançait mardi un "bilan provisoire" de 19 morts "confirmés".
Pour le journaliste de France 24 Thomas Nicolon, il est encore trop tôt pour savoir comment les Congolais réagiront à cet accord. "La population est un électron libre, a-t-il commenté. Il est difficile de palper la tendance politique, car l'UDPS, le parti de l'opposition, a très peu mobilisé ces derniers jours".
"Les évêques ont mis en jeu leur légitimité"
L'Église a, quant à elle, lancé "un SOS", après une nouvelle attaque menée mardi par des Pygmées, en conflit avec l'ethnie Bantou, et qui a fait selon elle au moins 40 morts mardi dans la ville de Manono, à 480 km au nord de Lubumbashi. Les autorités parlent de six morts. "Les evêques, qui ont mis en jeu leur légitimité dans ces négociations, ont su apaiser les esprits pour aboutir à cet accord, a ajouté Thomas Nicolon. Reste à savoir si le calme va revenir et perdurer dans les prochaines semaines."
État-continent de 70 millions d'habitants, la RD Congo n'a jamais connu de transition pacifique du pouvoir depuis son indépendance de la Belgique en 1960. Les cinq premières années de son existence ont été marquées par une lutte pour le pouvoir ayant entraîné une guerre civile dont est sorti seul vainqueur le général Mobutu en 1965.
Celui-ci sera renversé en 1997 par Laurent-Désiré Kabila, père de l'actuel président, qui lui succèdera à son assassinat en 2001, en pleine deuxième guerre du Congo (1998-2003).
Confirmé en 2006 à la tête du pays, lors des premières élections libres organisée depuis l'indépendance, M. Kabila a été réélu en 2011 lors d'un scrutin entaché de fraudes massives, à l'origine de la crise actuelle.
Avec AFP