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Le président Erdogan a menacé, vendredi, d'ouvrir les frontières turques pour laisser passer les migrants vers l'Europe, au lendemain d'un vote du Parlement européen demandant le gel des négociations d'adhésion du pays à l'UE.

Au lendemain d'un vote du Parlement européen demandant le gel des négociations d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, Recep Tayyip Erdogan durcit le ton. Il menace d'ouvrir ses frontières pour laisser passer les migrants. Cette escalade survient après des semaines d'échanges acerbes entre Ankara et Bruxelles, qui accuse les autorités turques de matraquer l'opposition, dans la foulée de la tentative de coup d'État de juillet.

"Lorsque 50 000 migrants se sont amassés au poste-frontière de Kapikule [à la frontière turco-bulgare, NDLR], vous avez crié à l'aide, a lancé le chef d'État lors d'un discours à Istanbul. Vous avez commencé à vous demander : 'Que ferons-nous si la Turquie ouvre ses frontières ?'. Écoutez-moi bien. Si vous allez plus loin, ces frontières s'ouvriront, mettez-vous ça dans la tête !".

Le président turc a également réaffirmé qu'il promulguerait le rétablissement de la peine capitale si le Parlement le votait. Et ce, malgré les avertissements de l'Union européenne, qui considère une telle mesure comme incompatible avec une adhésion au bloc.

Un pacte qui fait pschitt

Cette tempête diplomatique fait tanguer un pacte controversé conclu en mars 2016 entre le gouvernement turc et l'UE. Ce pacte avait permis de réduire à quelques dizaines le nombre de personnes gagnant quotidiennement les îles grecques en mer Egée contre plusieurs milliers au cours de l'été 2015.

En contrepartie de cet accord, Ankara avait notamment demandé une exemption des visas Schengen pour ses ressortissants, l'ouverture de nouveaux chapitres du processus d'adhésion et une aide financière pour l'accueil des trois millions de réfugiés, dont 2,7 millions de Syriens, qui se trouvent sur son sol.

Mais l'accord sur les visas est embourbé, l'UE reprochant à la Turquie de n'avoir pas rempli les 72 critères requis. De son côté, le gouvernement turc accuse les pays européens de ne pas envoyer l'aide financière promise pour l'accueil des réfugiés, ce que Bruxelles dément.

"Vous n'avez pas tenu vos promesses"

"C'est nous qui accueillons plus de trois millions de réfugiés dans ce pays, et vous qui n'avez pas tenu vos promesses", a déclaré le président Erdogan. Dans ce contexte, il a évoqué début novembre l'option d'un référendum sur la poursuite ou non des négociations d'adhésion si aucune avancée n'était enregistrée sur la question d'ici la fin de l'année.

Le porte-parole du gouvernement allemand a tenté de calmer la situation : "Nous considérons l'accord entre la Turquie et l'Union européenne comme un succès commun et la poursuite de cet accord est dans l'intérêt de tous les acteurs [...]. Des menaces des deux côtés n'avancent à rien", a déclaré Ulrike Demmer.

Le Parlement européen a demandé, jeudi 23 novembre, le "gel temporaire" de ce même processus d'adhésion en votant une résolution non contraignante, estimant que les "mesures répressives prises par le gouvernement turc dans le cadre de l'état d'urgence sont disproportionnées".

Après le putsch manqué du 15 juillet, les autorités turques ont lancé de vastes purges. Plus de 36 000 personnes ont été incarcérées, selon les chiffres officiels.

Cet avertissement abrupt survient à quelques mois de scrutins majeurs en Europe, dont une élection présidentielle en France et des élections fédérales en Allemagne, deux piliers européens confrontés à la montée des populismes et où la question migratoire risque d'être centrale.

Avec AFP