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Si le marché du tourisme a progressé de 4,4 % en un an, les destinations choisies changent au gré de la dangerosité réelle ou supposée des pays, ou encore de la fluctuation des taux de change. Tour d’horizon des destinations prisés ou délaissés.
Les destinations sont loin d'être immuables dans le domaine touristique. Attentats, épidémies, fluctuations monétaires ou migrations : le panorama touristique mondial change de plus en plus vite et des millions de voyageurs délaissent parfois en quelques mois un pays se rendre dans de nouvelles destinations pas toujours préparées à l'afflux de visiteurs.
Le marché du tourisme ne s'est jamais aussi bien porté : près d'1,18 milliard de personnes ont voyagé à l'étranger en 2015 - une progression de 4,4 % en un an d’après l'Organisation mondiale du tourisme. Mais entre les plages d'Afrique du Nord abandonnées et la baie de la Havane saturée, la situation est "contrastée", poursuit l’organisme.
Le Moyen Orient associé à l’insécurité
Exemple le plus marquant, la Tunisie, qui a vu ses plages et ses hôtels se vider après deux attentats meurtriers visant des étrangers - celui du musée du Bardo et celui de Sousse. Destination phare pour son soleil garanti et ses prix imbattables, le pays a perdu près de deux millions de vacanciers en un an, et vu son économie gravement accuser le coup.
Par un effet domino "les pays de tradition musulmane souffrent tous, à des degrés divers, même ceux complètement sécurisés comme Oman", résume à l'AFP Jean-François Rial, PDG du voyagiste français Voyageurs du Monde. "La seule exception est l'Iran, mais le pays partait de rien" dit-il.
L'ancienne Perse est en effet proposée par de nombreux voyagistes européens depuis le récent dégel avec la communauté internationale.
"Il n'y a aucun doute que l'ensemble de la région Moyen-Orient est aujourd'hui associée à l'insécurité dans la tête du touriste occidental. Et ce sont des pays comme la Grèce, le Portugal et l'Espagne qui vont clairement en bénéficier car ils offrent un climat similaire, des prix compétitifs et la sécurité", souligne de son côté Wouter Geerts, analyste au cabinet international Euromonitor.
Cela se traduit par un besoin accru de lits dans ces pays : "Du coup les prix augmentent et les hôteliers disent aux voyagistes 'au lieu de faire la nuit double à 50 euros je la fais à 55, à prendre ou à laisser car j'ai trois autres demandes derrière'", remarque Olivier Petit, associé au cabinet In Extenso.
Cuba a le vent en poupe
Autre destination à la mode, qui reçoit de plus en plus de touristes depuis le rétablissement de ses relations avec les États-Unis : Cuba, où d'énormes bateaux de croisière mouillent désormais quotidiennement dans la baie de La Havane - une image très rare avant le 17 décembre 2014 qui a scellé le dégel avec Washington.
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La bataille pour les chambres d'hôtels fait également rage à La Havane. "J'ai un groupe de 250 personnes qui arrive cette semaine et je viens d'apprendre que je ne pouvais plus compter sur 80 chambres qui avaient pourtant été payées et réservées depuis mars ! Tout ça à cause du surbooking", déplore Stéphane Ferrux, directeur de l'une des rares agences de voyage françaises de La Havane, "Cuba autrement".
Cuba a connu un bond de 17 % de fréquentations en 2015, "mais le pays n'est pas préparé, la qualité n'est pas au rendez-vous par rapport aux prix qui ont augmenté de 50 % en un an et tout le monde veut tirer profit de la manne", poursuit le professionnel.
Zika et taux de change
Les plages paradisiaques d'Haïti commencent aussi à retenir l'attention, six ans après un séisme dévastateur. Nouveaux bataillons de touristes en Colombie, Pérou, Mexique ou Argentine : "Juste après Charlie, l'Europe, les États-Unis ou encore le Canada avaient profité des reports de destinations. Mais depuis quelques mois, les Français ont à nouveau besoin d'exotisme, mais sécurisé, et l'Amérique latine en bénéficie", indique Jean-François Rial.
Le continent sud-américain sera-t-il affecté par la crainte du virus Zika ? Les épidémies pénalisent durement le secteur : Ebola en Afrique sub-saharienne, Chikungunya aux Antilles, Coronavirus Mers en Corée du Sud.
Sans compter l'effet des fluctuations des taux de change, qui poussent les touristes (notamment asiatiques) à changer de destination, ou à ne plus partir en vacances comme les Russes appauvris par la chute du rouble.
Les flux migratoires ont aussi perturbé ceux de touristes : l'île grecque de Kos a ainsi enregistré quelque 178 000 annulations entre janvier et août 2015, et selon Euromonitor certaines compagnies de croisières ont décidé de ne plus s'arrêter à Mytilene, capitale de Lesbos.
Avec AFP