
Les Taliban ont resserré leur étau lundi sur la province afghane du Helmand. La veille, face à l'urgence de la situation, le vice-gouverneur de la province appelait le président Ashraf Ghani à l'aide sur Facebook. Il n'a pas répondu.
L’appel au secours de Mohammad Jan Rasoolyar, vice-gouverneur de la province du Helmand en Afghanistan, n’aura pas été entendu à temps. Dans la matinée du 21 décembre, les Taliban ont resserré l’étau autour du district de Sangin, situé dans le nord-est du Helmand. La veille, dans un message désespéré adressé au président afghan Ashraf Ghani, le vice-gouverneur avait prévenu sur sa page Facebook que sa province était "sur le point" de tomber dans sa totalité aux mains des insurgés, après plusieurs jours de combats durant lesquels 90 soldats afghans sont morts.
"L'ennemi a capturé des bâtiments gouvernementaux, dont le siège de la police, le bureau du gouverneur du district, ainsi que celui de l'agence de renseignement, mais les combats se poursuivent", avait assuré M. Rasoolyar. Jugeant même la situation "catastrophique", dans son message il avait dénoncé un mensonge généralisé sur la situation réelle. "Tout le monde essaie de cacher la vérité", avait-il déclaré.
Facebook en derniers recours
Admettant que Facebook n’est pas la meilleure source pour délivrer ce message, Mohammad Jan Rasoolyar a voulu tirer la sonnette d’alarme. "Je sais par avance que soulever le problème sur les réseaux sociaux va vous mettre en colère", a-t-il écrit au président afghan, "Mais je ne peux rester silencieux plus longtemps". "Le Helmand n’est pas comme Kunduz. S’il tombe entre les mains de l’ennemi, nous ne pourrons pas lancer d’opération depuis l’aéroport pour reprendre la province, ce sera tout bonnement impossible", a-t-il alerté, précise la BBC.
Le témoignage d’habitants joints par l'AFP va dans le même sens. Ils ont assuré que les routes menant au district de Sangin avaient été minées par les Taliban, rendant le ravitaillement en vivres quasiment impossible. "Si nous n'obtenons pas une aide du gouvernement local très rapidement, nous allons perdre toutes nos unités", a déclaré, de son côté, une source policière anonyme à Reuters.
Restant sourd à ces appels au secours, le gouvernement afghan n'a émis aucune réaction dimanche, le ministre de la Défense ayant même réfuté les premiers bilans des pertes au sein des troupes afghanes. Lundi seulement, à l'ouverture du conseil des ministres, le chef de l'exécutif Abdullah Abdullah a affirmé que les "responsables gouvernementaux chargés de la sécurité évaluent la situation dans le Helmand".
Le Helmand, berceau des Taliban
Le district du Helmand, province méridionale de l’Afghanistan est un territoire chargé de symbole pour les Taliban. Plus gros producteur de pavot en Afghanistan, il est le berceau de l'insurrection des Taliban, avec la province voisine de Kandahar. Les combats qui y font rage depuis le printemps se sont intensifiés ces dernières semaines.
La conquête de cette province par les insurgés leur permettrait de signer une nouvelle victoire après leur éphémère prise de la grande ville de Kunduz au nord du pays fin septembre, une véritable humiliation pour Kaboul dont les forces de sécurité sont seules en première ligne sur le terrain depuis la fin de la mission de combat de l'Otan il y a tout juste un an.
Les forces afghanes sont harcelées dans la quasi-totalité du pays depuis le début de l'"offensive de printemps" des Taliban et elles ne peuvent plus compter sur l'aide de l'Otan sur le terrain. Les 13 000 soldats étrangers déployés dans le pays sont en effet désormais cantonnés à une mission de conseil et de formation.
Avec AFP et Reuters