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François Hollande en Haïti esquive l'épineuse question de la dette française

Accueilli par Michel Martelly, François Hollande a annoncé mardi que la France apporterait un important soutien à la modernisation du système scolaire haïtien, sans faire d'allusion à la polémique sur la dette française en Haïti.

Achevant sa tournée caribéenne, François Hollande s’est rendu mardi 12 mai en Haïti, accueilli par son homologue Michel Martelly, sur fond de polémique au sujet de l'acquittement de la dette de l'indépendance par la France.

Devant un important parterre d'invités de la société civile haïtienne et son gouvernement, le président haïtien Michel Martelly s'est adressé à François Hollande pour lui dire qu'"aucun marchandage, aucune compensation ne peut retaper les accrocs de l'histoire qui nous marquent si profondément encore aujourd'hui". Et comme pour clore la polémique, le chef de l'État du pays de la Caraïbe a aussi ajouté que "Haïti n'a pas oublié, mais elle n'est pas non plus obstinée".

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De son côté, le président François Hollande a passé sous silence l'épineuse question de la dette, préférant adresser au nom du peuple français "un message d’amitié et de solidarité" à la population haïtienne. Puis, répondant à Michel Martelly qui a appelé la France à mettre en œuvre "un véritable plan Marshall pour l'éducation", François Hollande a confirmé que "la France apportera son soutien à une modernisation du système éducatif haïtien".

Il a annoncé qu'à travers l'Agence française de développement, 50 millions d'euros allaient être investis en Haïti pour soutenir le programme de scolarisation gratuite et obligatoire initié par le président Martelly dès le début de son mandat. "C'est le plus beau symbole que nous puissions, nous, offrir ensemble", a déclaré le président français. "On ne peut pas changer l'histoire, on peut changer l'avenir".

"Vous avez une jeunesse, une population ardente"

"Parce que nous voulons que tous les jeunes Haïtiens puissent être formés, scolarisés, accompagnés, suivis, parce que c’est leur droit le plus élémentaire et parce que c’est notre devoir", a lancé le président Hollande. "Nous allons donc former les professeurs haïtiens, faire en sorte que davantage de missions puissent être accomplies par des enseignants français. Nous déploierons, autant que nécessaire, par du volontariat mais aussi par des expertises, tout pour que vos écoles, vos lycées, vos universités puissent être accompagnés par la France."

Le président français a également fait savoir que la France créera un Institut français à Port-au-Prince "pour diffuser la langue française (...) dans ce grand pays francophone". Il a également annoncé que la France augmentera le nombre d’étudiants haïtiens boursiers sur son territoire.

Il s'est ensuite adressé au peuple haïtien, assurant que la France croit "en Haïti car vous avez des potentialités considérables, parce que vous avez une jeunesse, une population ardente".

Sans s'exprimer explicitement sur la question de la dette, il a conclu : "Vous ne demandez pas de l'aide, vous demandez du développement (...) Vous ne demandez pas de l'assistance, vous demandez des investissements".

"L'argent oui, la morale non"

Quelques dizaines de manifestants étaient contenus par la police haïtienne aux abords de la place du Champ-de-Mars. Certains jeunes brandissaient des pancartes sur lesquelles était notamment inscrit : "Hollande, l'argent oui, la morale non".

Lors de son passage en Guadeloupe dimanche, François Hollande avait suscité beaucoup d'espoir en annonçant qu'il viendrait en Haïti s'acquitter de la dette française. Des espoirs rapidement douchés quand l'entourage du chef de l'État a précisé qu'il s'agissait d'un acquittement moral de la dette et non financier.

Au XIXe siècle, Haïti, première république noire de l'histoire a dû, pour obtenir sa reconnaissance sur la scène diplomatique, payer des indemnités aux anciens colons français pour compenser leur perte de revenus. Après l'indépendance d'Haïti en 1804, le royaume français avait en effet exigé que le jeune État verse une indemnité de 150 millions de francs-or. Après de nouveaux accords en 1838, Haïti a finalement dû payer à la France 90 millions de francs-or, l’équivalent de 17 milliards d’euros actuels, réglée finalement en 1952 avec le paiement des derniers intérêts. Une somme que beaucoup d'Haïtiens voudraient récupérer.

Avec AFP