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La Troïka demande à la Grèce de modifier l'exception grecque en matière de lait frais en faisant passer le délai de 5 à 11 jours. Un détail qui menace de faire chuter le gouvernement et met en péril la suite du versement de l’aide internationale.
Dis Antonis Samaras, c’est quoi cette bouteille de lait ? Le Premier ministre grec se retrouve embarqué dans une bataille lactée qui pourrait mettre en péril une loi cruciale présentée au Parlement, vendredi 28 mars, et dont dépend la suite du versement de l’aide financière internationale.
Dans ce texte se trouve une mesure très controversée en Grèce. Elle prévoit que le lait pourra désormais être qualifié de frais jusqu’à 11 jours après sa fabrication. Ce délai n’est actuellement que de cinq jours.
C’est la Troïka des créanciers d’Athènes - le Fonds monétaire internationale (FMI), la Banque centrale européenne (BCE) et l’Union européenne - qui pousse à cette modification. Elle appelle à mettre fin à l’exception grecque en matière de “lait frais” : les autres pays européens ont tous adopté le délai de 11 jours. L’OCDE (l’Organisation de coopération et de développement économiques) estime que le consommateur grec est perdant dans l’affaire. Le prix du lait frais en Grèce, environ 1,30 euros, est supérieur de 30 % à la moyenne européenne, d’après Eurostat, l’institut européen de la statistique.
Mais pour une partie des Grecs, cette posture en faveur du pouvoir d’achat n’est que de la poudre aux yeux. “Pas besoin d’être un expert pour comprendre que ce rallongement du délai a pour but véritable de permettre à des producteurs étrangers d’exporter plus facilement leur lait frais en Grèce”, a affirmé à la radio grecque, ce week-end, Mihalis Kassis, un député du Passok, le parti socialiste grec.
Majorité en péril
Conscients de l'impact d'une telle mesure sur leur activité, fermiers et producteurs nationaux de lait ont multiplié leurs efforts ces derniers jours pour convaincre députés et membres du gouvernement de s’opposer à cette loi.
Conséquence : la bataille du lait tourne au pataquès gouvernemental. Six députés de la majorité actuelle, trois du parti Nouvelle démocratie du Premier ministre et trois du Pasok, ont affirmé qu’ils s’opposeraient à la loi dont dépend pourtant le versement de la prochaine tranche de 10 milliards d’euros d’aide internationale. Pour Antonis Samaras, la voie lactée, pavée de bonnes intentions européennes, peut donc lui coûter la majorité. À l’heure actuelle, il n’a que 153 députés qui le soutiennent. Si les six députés rebelles tiennent parole et votent contre, “Antonio Samaras et son alliés du Pasok Evangelos Venizelos pourraient être obligés de les expulser de leur groupe respectif, ce qui mettrait la coalition en péril”, analyse le quotidien britannique “The Guardian”.
Des tractations de dernière minute devraient éviter que le gouvernement se noie dans un verre de lait, juge l’agence de presse Reuters. Mais l’épisode souligne à quel point le diable peut se nicher dans des détails des réformes imposées par la Troïka dans un pays sous perfusion financière internationale depuis quatre ans.