Le "Telegraph" estime que les journalistes sont devenus fous. Partout se tient le procès sur l’incorrigible "légèreté" française en matière de galanterie. Une autre exception française qui fait peut-être des envieux.
La presse britannique se demande, donc, si nous, confrères français, ne sommes pas devenus fous, simplement parce que nous n’avons pas harcelé et poussé dans ses retranchements François Hollande sur sa "love affair". La première question de la conférence de presse présidentielle était pourtant on ne peut plus directe : "Valérie Trierweiler est-elle encore la première dame ?" Que la réponse (qu’il apportera avant le 11 février, date de son voyage à Washington) ait laissé les Anglais – et quelques Français – sur leur faim, c’est possible, mais "nous n’avons pas les moyens de le faire parler". François Hollande a esquivé tout développement sur ce sujet, tenant sans doute compte du fait que sa compagne était sur un lit d’hôpital. Cela aurait ajouté l’injure à l’humiliation.. C’est ce que les Anglais prendront peut-être pour une hypocrisie française de plus : tant qu’à être goujat, soyons-le jusqu’au bout ! Et si le public a le droit de tout savoir de son président, piétinons joyeusement celle qui est tout de même la victime de l’incartade !
Mais revenons au délit : l’une des erreurs de François Hollande, "sa faute" selon certains, est de ne pas avoir compris que la presse à scandales française avait repris les méthodes des tabloïds d’outre-Manche. Elle ne pirate pas encore les communications privées, mais cela pourrait venir. Au passage, il est quand même étonnant que ceux-là même qui pensent que les hommes politiques n’ont pas le droit au respect de leur vie privée s’indignent des méthodes d’espionnage de la NSA.
Ce n’est pas une raison pour que la presse dite d’information se vautre dans ce type de curiosité. C’est pourtant ce que de nombreux journaux, télévisions et radios de référence ont fait, et c’est un précédent qui n’est pas glorieux. Fallait-il pour autant considérer que ce sujet méritait d’occuper l’essentiel de la conférence de presse ? J’aurai plutôt attendu des confrères anglo-saxons qu’ils nous reprochent, dans leur meilleure tradition, de ne pas avoir suffisamment usé d’un droit de suite sur le "virage libéral" annoncé par François Hollande : 50 milliards d’économies ? Dans quels domaines ? Quelles prestations sociales seront sacrifiées ? Aux dépens de quelles catégories ?
Selon le chef de l’État, "il faut produire plus et produire mieux". Faut-il nous remettre à "produire" ? Cela signifie-t-il que nous devrons travailler plus sans gagner plus ? Renoncer aux 35 heures subventionnées par le budget de l’État ? Prendre moins de vacances ? Partir à la retraite plus tard ? Expliquez-vous M. le Président !
Au lieu de cela, la presse britannique nous reproche de ne pas avoir suffisamment mis notre nez dans la couche présidentielle : "Depuis combien de temps cela dure-t-il ? Vous retrouviez-vous souvent ? Valérie était-elle au courant ? Depuis quand ? Vous disputiez-vous souvent ?" Ou pire : "Ce n’est pas la première fois, avez-vous un problème avec la fidélité ? L’engagement ? Si vous avez autant de mal à tenir une promesse à une femme, cela n’explique-t-il pas que vous ayez autant de mal à tenir vos promesses aux Français ?"
Chers et estimés confrères, "pardon my French", mais on s’en tamponne ! En tout cas, tant que les activités privées de notre Président n’interfèrent pas avec la manière dont sont, par exemple, distribuées les prébendes républicaines. Il est vrai que c’est souvent le cas, comme par exemple la nomination envisagée de l’actrice Julie Gayet au Jury de la Villa Médicis. Choix qui a été sagement écarté par la ministre de la Culture.
Lire dans le "Daily Telegraph" que cette affaire est comparable au scandale "Clinton/Lewinski" est tout simplement ridicule. Dans les deux cas, il s’agit bien d’une infidélité conjugale mais Monica Lewinski était une stagiaire à la Maison blanche, et cela ouvrait légitimement la question d’un harcèlement possible. Ici, on est dans la plus pure tradition française du libertinage. Une folie, en effet.