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Florence, 26 ans : "Je suis une chômeuse heureuse"

Le chômage n'est pas une fatalité pour tout le monde. C'est le cas de Florence T, une Parisienne de 26 ans, titulaire d’un BAC, qui a choisi de faire de l'intérim pour partir en voyage entre deux missions. Rencontre avec une chômeuse atypique.

Florence T., 26 ans, est de retour à Paris après quatre semaines dans le sud de la France. Elle a d'abord fait la fête à Barcelone, en Espagne, avant de flâner du côté de Montpellier, dans le sud de la France. Un programme qui s'apparente à de petites vacances ... mais en fait, la jeune Parisienne est au chômage. Pour elle, chaque période d'inactivité est synonyme d’évasion. L'année dernière, elle est partie pour un périple de deux mois en Inde avec son sac à dos. "J'ai retrouvé une amie sur place, je me suis baladée dans le pays, j'ai rencontré plein de gens, j'ai parlé anglais. C'était génial !", résume-t-elle avec insouciance.

Alors que la France recense 3,279 millions de demandeurs d'emploi en juin, Florence se dit "heureuse" de sa situation. Sa recette : alterner ses missions en intérim comme vendeuse avec des périodes chômées pour voyager. Techniquement, actualiser sa situation à Pôle emploi chaque début de mois n’est pas un problème, affirme Florence, même depuis l'étranger. Quand elle était en Inde, elle a simplement posé les cinq semaines de congés règlementaires par an. Pour le reste, il lui a suffi d'actualiser sa situation mensuelle, afin de déclarer être toujours à la recherche d’un emploi, depuis n'importe quel ordinateur.

Cette astuce bien connue, qui lui permet de continuer de percevoir ses allocations, n'est pratiquée que par un nombre très marginal de demandeurs d’emploi, indique-t-on à Pôle emploi. Il s'agit généralement de profils spécifiques qui n'ont "aucun souci à trouver un travail", tels que les vendeurs, les saisonniers, ou encore les serveurs en restauration, indique un responsable d'agence qui préfère garder l'anonymat. "Ces professions correspondent à des salaires précaires et sans grande perspective d'avenir, poursuit-il. Ce qui implique que ce genre de chômeurs, qui touchent de faibles indemnités alors qu'ils ont déjà leur loyer à payer et leur nourriture à acheter, ne peuvent pas se permettre de voyager très souvent ni très longtemps. Ce sont donc des situations exceptionnelles". 

"Je galère les quinze derniers jours du mois"

La jeune Parisienne, dont les indemnités chômage s'élèvent à environ 1 000 euros par mois, estime qu'une fois le loyer de la colocation payé, il ne lui reste alors que 600 euros par mois pour vivre. Elle avoue "galérer les quinze derniers jours du mois" alors qu’elle vit "comme une reine en Inde !"

Elle reconnaît "profiter du système plutôt que l'inverse". Titulaire d'un bac Sciences et Technologies Industrielles (STI), cette vendeuse a fait le choix du travail temporaire plutôt que de "s'enfermer dans un CDI". Une expérience qu'elle a déjà vécue il y a trois ans, quand elle travaillait pour une enseigne de vêtements féminins, et qui ne lui a pas laissé un souvenir impérissable. "En deux ans, je me suis sentie exploitée avec des horaires de fou et un salaire de misère", résume-t-elle. Elle a donc préféré démissionner. "Déçue par le marché du travail", elle a alors opté pour l'intérim qui lui permet "d'évoluer en découvrant de nouvelles boîtes".

Si Florence est une intérimaire par choix, ce n'est pas le cas de tous les travailleurs temporaires. Après huit mois au chômage, Anthony A., 35 ans, a fini par accepter une mission en tant que juriste dans une grande entreprise française de haute technologie. "C'est la seule opportunité que j'ai trouvée, explique ce cadre qui voit dans l'intérim "un moyen de rester connecté au monde du travail", voire même un tremplin pour décrocher un CDI.

L’intérim menacé en temps de crise

Le travail temporaire est de plus en plus sollicité par les demandeurs d’emploi qui y voient de multiples avantages : un moyen d'acquérir de l'expérience professionnelle, de la diversifier, de se former ou encore d’accéder à un CDI. "Sans compter qu’il est plus sécurisant que le CDD, plus proche aujourd’hui de la précarité", indique François Roux, délégué général des Professionnels de l’intérim, services et métiers de l’emploi (Prisme). L’intérim dispose du statut social le plus avancé d’Europe avec des aides sociales pour l’emploi et la formation".

Sauf qu’avec la crise, le travail temporaire est aujourd’hui menacé. Forte de 600 000 intérimaires (soit 3 % de la population active), la France compte à présent 500 000 équivalent temps plein, selon les chiffres de 2013. "Aujourd'hui, on s'approche du triste record de 1993 avec 475 000 personnes en mission d'intérim, précise François Roux. Qui dit crise, dit systématiquement baisse de l'intérim", résume le délégué général du Prisme qui ne se montre guère optimiste quant à une reprise prochaine de l’emploi. Actuellement, 1 000 nouveaux chômeurs s'inscrivent chaque jour à Pôle emploi.