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Le retour discret, mardi, du président algérien Abdelaziz Bouteflika à Alger, après plus de deux mois d'hospitalisation à Paris, suscite toujours de nombreuses questions sur sa santé, sa capacité à reprendre ses fonctions et achever son mandat.

Le retour au pays du président algérien Abdelaziz Bouteflika est-il pour autant synonyme de retour au pouvoir ? Au lendemain de son arrivée, la presse algérienne semble fortement en douter. "Bouteflika pourra-t-il exercer ses fonctions ?", s'interroge "El Watan" dans son édition de mercredi 17 juillet. "Le mystère demeure entier", écrit le journaliste du quotidien algérien, Hacen Ouali. 

Hospitalisé près de trois mois à Paris suite à un accident vasculaire cérébral le 27 avril dernier, Abdelaziz Bouteflika, 76 ans, revient à Alger mais reste en convalescence. Selon le communiqué de la présidence de la République, le président "poursuivra une période de repos et de rééducation".

Retour discret en fauteuil roulant

De quoi expliquer ce retour en toute discrétion. Alors que la chaîne algérienne Ennahar - proche du pouvoir - a pris soin de retransmettre, mercredi, des images d'archives montrant un Bouteflika fringuant descendre d'avion, la télévision A3 a, de son côté, diffusé des images exclusives montrant "un président pas totalement remis, assis sur une chaise roulante, les traits tirés, le regard absent et le geste lent", note le quotidien algérien "Le Soir d'Algérie". 

"Le fait qu’il ait embarqué en chaise roulante signifie qu’il n’a toujours pas retrouvé ses fonctions motrices", peut-on lire dans le journal. "L’absence de son, lors de la séquence filmée apparemment au niveau du salon d’honneur de l’aéroport militaire de Boufarik [...] laisse déduire aussi qu’il ne s’est pas remis de son aphasie". 

"Sa santé ne lui permettra pas de retourner au pouvoir"

À Alger, la population se montre également sceptique sur sa capacité à diriger le pays. "Son retour au pays ne signifie pas pour autant qu'il soit guéri", indique un Algérois interrogé par FRANCE 24. "Sa santé ne lui permettra pas de retourner au pouvoir", renchérit un autre habitant de la capitale. Bouteflika a élu domicile dans une de ses résidences algéroises, précise "El-Watan", et non dans le palais présidentiel d'El Mouradia, inoccupé depuis quatre-vingt-deux jours maintenant.

Son retour est un "non évènement", affirme sur FRANCE 24 le politologue algérien
Fodil Boumala, "puisque depuis 2005, le président n'a pas dirigé le pays qui est livré à lui-même". Suite à son opération chirurgicale pour un ulcère hémorragique à l'estomac il y a sept ans à Paris, Bouteflika, au pouvoir depuis 1999, avait déjà allégé ses activités présidentielles.

Préparer la succession

Selon le politologue, il ne revient pas pour finir son mandat, "mais pour préparer la succesion en vue de l'élection présidentielle en avril 2014". Fodil Boumala dénonce "une situation de crise gérée très maladroitement" par le gouvernement algérien. L'absence du chef d'État et le secret autour de sa maladie ont provoqué de vives polémiques dans le pays.

"Il n'y a pas de feuille de route pour diriger le pays, regrette le politologue. Et le pays se retrouve dans une impasse politique". Des partis d'opposition ont réclamé  l’application de l’article 88 de la Constitution qui prévoit, en cas de vacance prolongée du pouvoir, une procédure d'empêchement et l’organisation d’une élection présidentielle anticipée. Mais pour l'heure, le clan présidentiel freine des quatre fers. La seule chance pour le pays de sortir de cette impasse est de "voir émerger une alternance politique lors de la prochaine présidentielle", conclut Fodil Boumala.