
Des affrontements opposant des milliers de manifestants du secteur textile et la police ont eu lieu à Dacca, vendredi. Les protestataires s'étaient rassemblés suite à l'effondrement d'un immeuble, mercredi, ayant provoqué la mort de 272 personnes.
La situation a brutalement dégénéré dans les rues de Dacca, ce vendredi. Des dizaines de milliers de manifestants du secteur textile se sont violemment opposés aux forces de l'ordre alors qu'ils défilaient en réaction à l'effondrement d'un immeuble de huit étages, dans lequel travaillaient quelque 3000 salariés, tuant plus de 270 personnes. "La situation est explosive", a confié à l'AFP, Asaduzzaman, un officier de police, "des centaines de milliers de travailleurs du textile ont rejoint les manifestants. Nous avons dû tirer des balles en caoutchouc et des gaz lacrymogènes pour les disperser".
Les manifestants réclament "l'arrestation et l'exécution des propriétaires de l'immeuble [en fuite]", a ajouté le policier.
Mercredi, un immeuble, le Rana Plaza, qui abritait cinq ateliers de confection liés à la marque espagnole Mango et anglaise Primark, s'est effondré comme un château de cartes. Il s'agit du pire accident dans l'histoire industrielle de ce pays défavorisé qui a fait du secteur textile le pivot de son économie.
45 personnes secourus
Deux jours après, les secouristes s'activaient toujours pour tenter de retrouver des survivants dans les décombres. Mais le temps presse.
"Nous avons secouru 45 personnes aujourd'hui, dont 41 ont été trouvées au même endroit, vivantes" dans les gravats du quatrième étage de l'édifice, a annoncé à l'AFP le responsable national des pompiers, Ahmed Ali. "Nous avons localisé entre 20 et 25 personnes supplémentaires dans un autre endroit mais il est très difficile de les atteindre. Ils sont toujours en vie", a-t-il ajouté.
Les conditions de recherches sont très dures. "L'odeur est fétide, cela donne parfois envie de vomir. Il est difficile de travailler ici plus de 20 minutes d'affilée", témoigne Mohammad Tareq, employé d'un atelier qui s'est joint aux centaines de volontaires à pied d'œuvre jour et nuit. Certains attendent toujours des nouvelles de leurs proches disparus. "Je n'ai pas retrouvé mon fils", se lamente une mère de famille, après avoir inspecté les derniers corps arrachés à l'amas de béton et d'acier tordu.
Des fissures dans le bâtiment
Selon un officier supérieur de police, la grande majorité des victimes sont des femmes. La catastrophe a relancé la polémique sur la sécurité dans l'industrie textile fournissant des marques occidentales.
La catastrophe aurait-elle pu être évitée ? Des ouvriers du textile travaillant au sein du bâtiment s'étaient publiquement inquiétés la veille de fissures. Leurs responsables avaient pourtant ignoré les mises en garde, leur enjoignant de continuer le travail.
Les propriétaires des lieux sont introuvables depuis le drame. Mais la Première ministre du Bangladesh a promis jeudi que les responsables, en fuite, seraient pourchassés et punis. "Ceux qui sont impliqués, particulièrement le propriétaire qui a forcé les ouvriers à travailler là seront punis", a déclaré devant le Parlement Sheikh Hasina. "Où qu'il soit, nous le trouverons et nous le traînerons devant la justice.
Des dizaines de milliers d'ouvriers ont débrayé jeudi en signe de solidarité, provoquant la fermeture de centaines d'usines, tandis que les drapeaux étaient en berne pour une journée de deuil national.
En novembre 2012, un incendie dans une usine textile fournissant notamment l'américain Walmart avait fait 111 morts à la périphérie de Dacca. Selon des ouvriers, leurs responsables avaient demandé aux travailleurs de rester à leur poste en affirmant qu'il ne s'agissait que d'un exercice d'alerte incendie.
Avec dépêches