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Jeroen Dijsselbloem, un gaffeur en série à la tête de l'Eurogroupe

Jeroen Dijsselbloem n'occupe le poste de président de l'Eurogroupe que depuis trois mois, mais les sorties médiatiques intempestives du Néerlandais sur Chypre et les banques en irritent déjà plus d'un.

Sur la photo de son compte Twitter, Jeroen Dijsselbloem a l’air sérieux. Regard assuré derrière des petites lunettes d’instituteur : ce Néerlandais veut se donner une prestance digne de son emploi de président de l’Eurogroupe. Son dernier message sur le célèbre réseau de microblogging cadre d’ailleurs parfaitement avec ce que les observateurs attendent d’un homme qui a été au cœur de la négociation pour sauver Chypre de la faillite. “Chypre est un cas spécifique. Le programme [de sauvetage, NDLR] a été élaboré sur mesure et n’a pas vocation à être réutilisé [pour d’autres pays, NDLR]”, a ainsi écrit le 25 mars Jeroen Dijsselbloem.

Mais ce tweet a une histoire. C’est en fait une tentative pour rattraper une bourde faite le jour même. Il avait affirmé dans un entretien accordé au "Financial Times", le très influent quotidien économique britannique, que le plan de sauvetage de Chypre pourrait faire école pour d’autres pays de la zone euro en proie à des difficulté financières. Une remarque qui a elle seule a provoqué une chute sur les marchés financiers : les investisseurs ont craint que les banques d’autres pays soient taxées à leur tour. 

"Jeroen Dijsselbloem est bien la catatrophe annoncée"

Un dérapage médiatique qui, ajouté à d'autres déclarations intempestives sur Chypre et les banques, commence à faire désordre dans le milieu bruxellois, réputé très policé. Lors de la présentation du premier plan de sauvetage de l’île, le 16 mars, le président de l’Eurogroupe avait expliqué ne pas “avoir tranché” sur la question du sort des épargnants en Italie et en Espagne. Olli Rehn, le commissaire européen aux Affaires monétaires, avait alors dû redresser la barre pour assurer que les banques italiennes et espagnoles n’étaient pas dans le collimateur européen.

Sur Alphaville, le blog financier du "Financial Times", les sorties de Jeroen Dijsselbloem sont jugé rédhibitoires. Elles devraient lui coûter son poste de patron de l’Eurogroupe, juge ainsi Paul Murphy, le journaliste blogueur du "Financial Times". Pour Jean Quatremer, le correspondant du quotidien français "Libération" à Bruxelles très actif sur Twitter, ces erreurs de communication à répétition prouvent que “Jeroen Dijsselbloem est bien la catastrophe annoncée”.

Le candidat du compromispour Angela Merkel

Il faut dire que la nomination en janvier 2013 du ministre hollandais des Finances à la tête de l’Eurogroupe en avait surpris plus d’un. Le quotidien économique français "Les Échos" assurait, à l’époque, que Jeroen Dijsselbloem a beau être “intelligent” et “posé”, il ne “connaît rien à l’économie”.

Son CV ne ressemble en effet pas à celui du candidat idéal à la tête de l’Eurogroupe. Avant d’être bombardé ministre des Finances des Pays-Bas en novembre 2012, il occupait le poste de porte-parole du Parti travailliste néerlandais sur les questions relatives à l’éducation et l’enseignement. Mais la véritable spécialité de Jeroen Dijsselbloem est l’agriculture : il est titulaire d’un diplôme en économie agricole et a servi comme conseiller au ministre de l’Agriculture entre 1996 et 1998.

Sa principale qualité est d’être néerlandais. Au moment de choisir un remplaçant à Jean-Claude Juncker à la tête de l'Eurogroupe, l’Allemagne voulait un représentant du Benelux (Belgique, Luxembourg et Pays-Bas). Normal :  ce bloc de pays est réputé proche des vues économiques de Berlin. Comme le président sortant était Luxembourgeois et qu’un Belge, Herman Van Rompuy, occupe déjà le poste important de président du Conseil européen, un candidat néerlandais semblait tout désigné.

La chancelière Angela Merkel avait d’ailleurs présenté Jeroen Dijsselbloem comme un candidat du compromis après que les hypothèses d’une nomination du ministre allemand des Finances, Wolfgang Schaüble, ou de son homologue français, Pierre Moscovici, avaient été écartées. Un compromis que la chancelière allemande commence peut-être à regretter.