Depuis une semaine, il est possible de se connecter à l’Internet sur son smartphone depuis la Corée du Nord. Une première brèche dans l’isolement technologique du pays, pour l'heure réservée aux seuls étrangers.
C’est un tableau inédit de la Corée du Nord qui est en train de se dessiner sur Twitter et Instagram, le réseau social de partage de photos prises depuis un smartphone. Ces gazouillis et ces clichés sont l’œuvre de la journaliste de l’agence de presse AP Jean H. Lee, du photographe d’AP David Guttenfelder ou encore de la star américaine du basketball Dennis Rodman.
Point commun de ces contributions 2.0 : elles ont toutes été envoyées depuis l’intérieur de ce pays réputé, entre autre, pour son contrôle très strict d'Internet. Une première car, jusqu’à présent, accéder au Web depuis la Corée du Nord était impossible ou presque. Mais, depuis lundi 24 février, le régime autoritaire d’inspiration communiste de Pyongyang a quelque peu desserré l’étau.
Il permet aux étrangers présents sur le territoire de surfer sur la Toile depuis un smartphone en utilisant une connexion 3G. Jean H. Lee a été la première à sauter sur l’occasion en twittant, lundi : “Mon premier tweet avec Internet fourni par Koryolink [un opérateur téléphonique mi-nord-coréen, mi-égyptien, NDLR]. Bonjour tout le monde, depuis le centre de presse de Pyongyang”.
Depuis, cette journaliste et son collègue photographe David Guttenfelder ont posté plusieurs photos sur Instagram qui en disent un peu plus long sur le quotidien dans cette dictature coupée du monde extérieur. On y voit des scènes de vie presque banales, comme des enfants en train de prendre des photos ou un sapin de Noël décoré dans un appartement. D’autres clichés véhiculent des messages autrement plus politiques comme celui de Nord-Coréens passant devant un mur recouvert d’affiches de propagande ou encore cette photo d’une autoroute à quatre voies désespérément vide au sud de Pyongyang.
Dennis Rodman veut rencontrer Psy...
Mais les deux journalistes ne sont pas les seuls à profiter de cette liberté d’accès à Internet en 3G. Arrivé mercredi 26 février en Corée du Nord, l’ex-basketteur américain Dennis Rodman s’est empressé de partager avec les 113 000 internautes qui le suivent sur Twitter qu’il “vient en paix et aime tous les habitants de Corée du Nord”. Quelques heures plus tard, il a connu un petit dérapage géographique en souhaitant, toujours sur le réseau de microblogging, pouvoir “rencontrer ce Psy, le type du Gangnam Style”. Le chanteur sud-coréen s’est empressé de lui répondre qu’il y avait une grande différence entre les deux Corées.
Afin de se connecter, encore faut-il montrer son passeport étranger aux autorités nord-coréennes et leur donner le numéro identifiant de son téléphone, comme le raconte Jean H. Lee. Les coûts de connexion sont, en outre, prohibitifs pour le commun des mortels nord-coréens. La carte SIM est vendue 50 euros et, pour activer le réseau 3G, il faut dépenser, en plus, 75 euros.
Les Nord-Coréens doivent, quant à eux, se contenter d’un réseau largement déconnecté de l’Internet mondial. Quand ils peuvent surfer sur ce simili-Web - ce qui est loin d’être le cas pour la majorité d’entre eux - ils n’ont accès qu’à un éventail très restreint de sites Internet autorisés par le régime de Pyongyang.
Mais, malgré cette mainmise, le régime semble de plus en plus ouvert aux nouvelles technologies. Le nouveau leader du pays, Kim Jung-un “a fait de la science et des technologies une priorité nationale”, rappelle Jean H. Lee. Il a ainsi rencontré, début janvier, le président de Google, Eric Schmidt. Depuis septembre 2012, la Corée du Nord vend également une tablette tactile, une sorte d’iPad local baptisé Samjiyon. Reste à savoir, dorénavant, si et sous quelles conditions Pyongyang va étendre au reste de la population nord-coréenne la possibilité de surfer sur le Web depuis son smartphone.