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Affaire Firmin Mahé : un acquittement et du sursis pour les militaires français

La cour d’assises de Paris a prononcé vendredi un acquittement et de la prison avec sursis pour les quatre militaires français accusés du meurtre de l’Ivoirien Firmin Mahé. Le colonel Burgaud écope de la peine la plus lourde: cinq ans avec sursis.

À l’issue de deux semaines de procès, un acquittement et trois peines de prison avec sursis ont été prononcés vendredi par la cour d’assises de Paris pour les quatre militaires français de la force Licorne, accusés du meurtre de l’Ivoirien Firmin Mahé. L’épilogue d’une affaire considérée comme extraordinaire, tant il est rare que des militaires soient traduits devant des assises.

Le 13 mai 2005, Firmin Mahé, un "coupeur de routes" notoire qui sévissait dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, alors en proie à une guerre civile, a été étouffé dans un sac en plastique, à l’arrière d’un véhicule blindé. Cet homme était considéré par les soldats français et une bonne partie des habitants, comme un dangereux criminel, terrorisant la population et dépouillant les voyageurs.

L'adjudant-chef Guy Raugel, qui avait avoué avoir exécuté Firmin Mahé a écopé de quatre ans avec sursis, tandis que le brigadier Johannes Schnier, qui maintenait l’homme pendant le meurtre, a été condamné à un an avec sursis. Le brigadier Lianrifou Ben Youssouf, conducteur du véhicule qui transportait Firmin Mahé, blessé, vers la ville de Man, a quant à lui été acquitté.

La plus lourde peine - cinq ans avec sursis - a été prononcée contre le colonel Eric Burgaud. Après avoir nié les faits, ce dernier avait finalement reconnu avoir transmis l'ordre de ne pas laisser le bandit vivant. Un ordre qu’il aurait reçu du général Henri Poncet, commandant de la force française Licorne à l'époque : "Roulez doucement... vous m'avez compris" aurait-il dit. Le général Poncet a toujours démenti ces propos. Mis en examen au début de l’enquête, il avait finalement bénéficié d'un non-lieu en 2010.

Attitude "indigne"

Vendredi, jour du verdict, le colonel Eric Burgaud a jugé "indigne" l’attitude du général. La tension entre les deux hommes est apparue comme l’un des éléments phares du procès. "J'affirme devant vous que le général Poncet ici présent m'a bien donné l'ordre dont j'assume la totale responsabilité," a-t-il ainsi lancé, à la barre mardi 4 décembre. Une déclaration accueillie par les applaudissements du public, tandis qu’Henri Poncet, imperturbable, n’a pas adressé un regard au colonel Burgaud. "Un mort ne m’intéressait pas mais un blessé m’intéressait pour l’interroger," avait auparavant précisé le général.

Renvoyant les militaires à leurs responsabilités, l'avocate générale, Annie Grenier, a néanmoins estimé que "le devoir d'un militaire, c'est de refuser d'exécuter un ordre illégal". Également citée comme témoin, l’ancienne ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie, a affirmé que les "militaires sont confrontés à des situations très difficiles, mais la règle veut que l'on respecte le droit".

"La France devrait les décorer"

Autre moment-clé du procès : l’intervention de l’ancienne adjointe au maire de Bangolo, une commune de l’ouest de la Côte d’Ivoire dans laquelle avait été capturé Firmin Mahé. Adèle Dito, 67 ans, a déclaré que "la France devrait décorer" les accusés plutôt que de les condamner.

"Mahé avait un groupe qui terrorisait la population", a-t-elle affirmé, s’attirant aussitôt les foudres d’une partie des Ivoiriens présents dans la salle. La famille de la victime maintient qu'il n'était pas un coupeur de route.