Le pianiste américain avait su rendre ses compositions mondialement populaire à une période où le jazz devenait confidentiel. Même si des puristes lui reprochent d'aseptiser le style, Brubeck, décédé mercredi à l'âge de 91 ans, est une légende.
Le pianiste David Brubeck, décédé mercredi 5 décembre aux États-Unis à la veille de son 92e anniversaire, restera pour toujours l’auteur de "Take five" : le tube au rythme impair, l'un des morceaux les plus célèbres du jazz américain et de la musique mondialisée. Une mélodie courte, facile à reconnaître mais difficile à exécuter. À l'instar de "Blue Rondo a la Turk" et de "Kathy's Waltz".
Ce grand admirateur de Duke Ellington - il jouait d'ailleurs "Take the A Train" régulièrement en concert - avait accédé au rang de légende dans son pays d'origine, où il s'est produit en concert devant chacun des présidents depuis John Kennedy. Il avait également eu les honneurs de la une du magazine "Time" dans les années 50.
Né le 6 décembre 1920 à Concord, en Californie, le jeune Brubeck passe son enfance dans un ranch entouré de mélomanes. Sa mère enseigne le piano et ses deux frères aînés deviendront comme lui des musiciens professionnels.
Il approfondit son savoir-faire auprès du compositeur classique français Darius Milhaud avant de lancer sa carrière en 1947, à San Francisco, au côté de celui qui deviendra son plus proche complice : le saxophoniste Paul Desmond, dont le son chaud sera la marque de fabrique de leur quartette.
Avec Joe Morello (batterie) et Eugene Wright (contrebasse), ils connaissent la consécration en 1959 avec "Time Out", premier album de jazz à s'écouler à plus d'un million d'exemplaires - aujourd'hui encore, environ 60 000 exemplaires de "Time out" s'écoulent tous les ans.
Bâti sur des rythmiques inhabituelles et des mesures saccadées, l'opus recèle deux morceaux d'anthologie: "Take Five" composé par Desmond et "Blue Rondo a la Turk", signé par Brubeck lui-même. L'album est produit par Teo Macero, avec qui Miles Davis a enregistré plusieurs albums de jazz fusion rock.
Cantates, ballets et musique symphonique
Certains puristes, notamment en France, reprocheront toutefois à Dave Brubeck, musicien blanc au physique de jeune premier, d'aseptiser le jazz en l'éloignant de ses racines afro-américaines et en lui ôtant toute dimension protestataire.
En 1958, Brubeck forme un nouveau quartette avec le saxophoniste Gerry Mulligan et se produit à partir de 1972 avec deux de ses fils ("Two Generations of Brubeck") avant de retrouver Mulligan en 1975.
Depuis une vingtaine d'années, Dave Brubeck n'avait cessé de tourner dans tous les grands festivals de jazz internationaux, ne s'éloignant jamais trop du style qui avait fait son succès dans les années 50 : utilisation du contrepoint, polyphonie, expérimentations rythmiques.
Fidèle à sa formation classique, Dave Brubeck a par ailleurs composé deux ballets, une comédie musicale, trois oratorios, quatre cantates, une messe, plusieurs morceaux pour formation de jazz et orchestre symphonique, ainsi que de nombreuses œuvres pour piano.
Les mélodies rythmiquement saccadées de Brubeck ont inspiré des chanteurs, notamment Carmen McRae, Al Jarreau et Claude Nougaro.
FRANCE 24 avec dépêches