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Tunisie : des dizaines de manifestants arrêtés après les protestations contre une usine chimique
Des dizaines de manifestants ont été arrêtés dans la nuit de vendredi à samedi à Gabès, en Tunisie, après plusieurs jours de manifestations pour demander la fermeture d'une usine chimique très polluante.
Des personnes participent à une manifestation contre la pollution causée par les usines chimiques, à Gabès, en Tunisie, le mercredi 16 octobre 2025. © Bassem Aouini, AP

Dans la nuit de vendredi 17 à samedi 18 octobre à Gabès, en Tunisie, des dizaines de personnes ayant participé aux manifestations ont été arrêtées, selon un avocat et un collectif anti-pollution. Ils protestaient contre un complexe chimique vieillissant, bâti dans les années 1970, qui utilise de l'acide sulfurique et de l'ammoniac pour transformer le phosphate. 

Les manifestants accusent l'usine d'empoisonner les sols, les eaux et les habitants de la région.

Les vidéos d'élèves secourus après des malaises ont poussé mercredi des milliers d'habitants de Gabès dans la rue pour réclamer la fermeture de l'usine, une mobilisation inédite depuis plusieurs années selon des militants. 

"Les arrestations visaient les personnes manifestant la nuit", a déclaré Mehdi Talmoudi, un avocat.

"Alors que les manifestations en journée ont été largement pacifiques, celles se déroulant la nuit ont parfois donné lieu à des affrontements avec les forces de sécurité et à des incendies de pneus", a-t-il précisé à l'AFP, sans pouvoir chiffrer le nombre d'arrestations.

Selon Khayreddine Debaya, coordinateur du collectif local Stop Pollution, "plus de 100 personnes ont été placées en garde à vue" samedi matin. "La police a arrêté plus de 70 personnes rien que la nuit dernière, et d'autres à l'aube", a-t-il ajouté, en notant que certaines ont été cueillies chez elles.

D'autres militants tunisiens ont dénoncé sur les réseaux sociaux "une vague d'arrestations".

Quelque 200 personnes "intoxiquées"

Des habitants de Gabès jugent que l'usine a récemment produit davantage de gaz toxiques et rejeté des déchets radioactifs dans la mer.

En un mois, près de 200 habitants des quartiers proches du complexe ont reçu des soins pour des "intoxications", selon les autorités.

En 2017, les autorités tunisiennes avaient promis de démanteler le complexe qui emploie 4 000 personnes dans une zone frappée par le chômage, pour le remplacer par un établissement conforme aux normes internationales.

Mais l'exploitation des mines de phosphates – principale richesse naturelle du pays – est "un pilier fondamental" de l'économie pour le président Kais Saied. Les autorités veulent quintupler la production d'engrais d'ici 2030, pour profiter de la hausse des prix mondiaux.

La présidence tunisienne a précisé samedi matin que Kais Saied avait convoqué deux responsables parlementaires pour discuter de "la situation environnementale" à Gabès.

Kais Saied a estimé dans un communiqué que "des travaux sont en cours pour trouver des solutions urgentes à la pollution".

La présidence juge néanmoins "nécessaire que les habitants et les forces de sécurité s'unissent pour faire face à ceux qui cherchent à exploiter la situation environnementale catastrophique à leur avantage", en fustigeant les "conspirateurs" qui ont été "arrosés d'argent étranger pour s'exprimer".

Avec AFP