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Ramallah célèbre la victoire d’Abbas sans véritable enthousiasme

, envoyée spéciale à Ramallah – Ils n’étaient guère plus de 300 Palestiniens, jeudi soir, place de l’horloge à Ramallah, à suivre sur écran géant le discours de Mahmoud Abbas. Et malgré la victoire diplomatique palestinienne à l'ONU, la joie n’était pas au rendez vous.

Ce n’est que vers 22 h, jeudi 29 novembre, que les Palestiniens ont commencé à affluer sur la place de l’horloge de Ramallah, en Cisjordanie, où un podium avait été installé avec en toile de fond les portraits géants du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas et de son prédécesseur, Yasser Arafat.

3 000 nouveaux logements dans les colonies

Israël va autoriser la construction de 3 000 nouveaux logements dans des quartiers de colonisation à Jérusalem-Est et en Cisjordanie, a indiqué, ce vendredi, un responsable israélien.

L’État hébreu entend, par ce projet, créer une continuité territoriale entre Maalé Adoumim (35 000 habitants) et des quartiers de colonisation de Jérusalem-Est, occupée et annexée depuis 1967, dont cette implantation urbaine est distante d'une dizaine de kilomètres.

Il a été vivement dénoncé par les Palestiniens, dans la mesure où il coupe pratiquement en deux la Cisjordanie, compromettant la viabilité d'un État palestinien.

En novembre 2011, après l'accession de la Palestine au statut de membre à part entière de l'Unesco, Israël avait également accéléré la construction dans les colonies de Cisjordanie occupée.

Mais la place était loin d’être noire de monde. Les quelques commerçants ambulants présents aux abords du rassemblement avaient allumé leur poste radio ou leur télévision. Plusieurs familles se tenaient à l’écart, sur les trottoirs, les mères enveloppant du drapeau palestinien leurs enfants endormis.

Au centre de la foule, des jeunes, principalement. Mais pas une seule fois ceux-ci n’ont applaudi lors du discours de M. Abbas.

"Le seul espoir que l’on a, est que le monde entier est en train d’écouter Abbas et de prendre conscience du problème de la Palestine" assène dans un anglais parfait une jeune étudiante.

"Ce siège à l’ONU est un premier pas symbolique. Mais nous, ce que l’on demande et ce que l’on veut est bien plus complexe et difficile à obtenir" soupire un père tenant son fils par l’épaule qui redoute surtout que ce vote "ne change rien".

"On a envie d’y croire. Même si c’est un leurre de plus"

Pour beaucoup de Palestiniens, l’obtention du statut d’État observateur n’apporte qu’une seule chose : la possibilité de saisir la Cour pénale internationale (CPI) et une éventuelle condamnation d’Israel pour sa politique d’occupation.

J'"espère qu’Abbas ne va pas baisser son froc et qu’il va saisir la CPI très rapidement. Il doit se montrer responsable et à la hauteur de ce qu’attendent les Palestiniens" veut croire Salma, employée d’une ONG internationale à Ramallah.

L’amie avec laquelle elle est venue fulmine à chaque phrase du président de l’Autorité Palestinienne: "Il va nous faire perdre. Son discours est insensé. Il ne parle pas des problèmes du détournement de l’eau, du non versement par Israël de nos droits de douane. Il ne se conduit pas en homme responsable. Et c’est le Hamas, son rival avec qui il va maintenant devoir faire la paix, qui va prendre le dessus et s’imposer politiquement".

Furieuse, elle n’a même pas attendu la fin du discours et est allée fumer une cigarette dans un café en attendant Salma.

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Le jour d'après: la réaction israélienne

"Pas de miracle"

Le discours fini, les gens sont rentrés chez eux, repliant les drapeaux qu’ils avaient à peine agités, sans même attendre les résultats.

"On sait qu’il l’emportera. On regardera les scores à la maison" dit Hicham, pressé de rentrer chez lui. D’autres se restauraient sur le pouce en prêtant peu d’intérêt à l’écran géant, sur lequel la délégation israélienne s’exprimait. Dans sa boutique, Youssef avait même coupé le volume de son téléviseur.

À minuit, le silence règnait sur la place alors qu’approchait l’annonce des résultats. Les visages étaient crispés. Puis, lorsque l’écran afficha 139 votes "oui", on entendit, pour la première fois de la soirée, des cris de joie et des voitures klaxonner.

"On ne s’attend pas à un miracle. Israel continuera d’imposer ses conditions et Abbas n’aura pas la marge de manœuvre qu’il souhaite. Mais ce soir, on a envie d’espérer. On a envie d’y croire. Même si c’est un leurre de plus", résume une femme courbée par son vieil âge et vêtue d’une robe traditionnelle.

"Je suis née en 1943 et je n’ai toujours connu que des promesses faites au peuple palestinien. On n’a jamais rien vu se concrétiser. Ca fait des années qu’on nous berne ! Et là on nous berne encore. Demain ne sera pas différent. La réaction israélienne sera même plus dure. Mais ce soir, ce "oui" me donne envie quand même envie d’espérer. C’est peut être la dernière fois".