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La Sibérie, bientôt une terre chinoise ?

Longtemps interdite aux étrangers, la Sibérie se met à l’heure chinoise. De plus en plus de Chinois traversent le fleuve Amour pour venir s’y installer. Leur présence, perçue comme une nouvelle concurrence, commence à inquiéter les autorités russes.

Depuis la chute du bloc soviétique, les Chinois sont de plus en plus nombreux à quitter l’empire du Milieu pour s’installer de l’autre côté de la frontière, en Russie, dans ce "Far East" (Extrême-Orient) historiquement appelé Sibérie orientale.

Les journalistes de FRANCE 24 se sont rendus à Blagovechtchensk, une ville russe située à plus de 8 000 kilomètres de Moscou et à 800 mètres à peine de la Chine. Les deux pays y sont simplement séparés par le fleuve Amour. En hiver, quand les eaux gèlent, on peut le traverser à pied. En été, il faut moins de dix minutes pour passer d’une rive à l’autre.

Apres avoir été une ligne de front où les divisions blindées des deux frères ennemis communistes se menaçaient, "Blago", autrefois ville fermée, est devenu le symbole de cette "sinisation" de l’Extrême-Orient. Ici, sans les Chinois, point de salut. Le développement de l’économie dépend entièrement des relations avec la Chine. Les terres agricoles, anciens kolkhozes délaissés, sont exploitées par des Chinois. Les mariages mixtes sont nombreux et le chinois la langue étrangère numéro un, enseignée de l’école à l’université. Ici, tous les Chinois parlent le russe et les Russes connaissent quelques mots de chinois.

Une cohabitation qui se passe plutôt bien, même si certaines voix s'élèvent contre cette "invasion pacifique". Beaucoup de Russes s'inquiètent de voir leur pays devenir un "réservoir" de matières premières pour le voisin chinois qui achète leur pétrole, qui exploite leurs forêts et leurs terres agricoles. D’autres, exclus du marché du travail au profit de cette main d’œuvre peu chère et efficace, dénoncent aussi un "péril jaune".

Un discours xénophobe en complète contradiction avec la réalité : ici, les Russes ont besoin des Chinois. À "Blago", on se souvient d’une époque pas si lointaine où les produits chinois aidaient les Russes à tenir le choc de la transition post-soviétique. Et aujourd'hui, c'est grâce à des entrepreneurs chinois que l'économie russe se modernise.