Malgré l'interdiction de manifester, des milliers de policiers boliviens poursuivent leur grève, entamée il y a six jours, pour exiger une revalorisation salariale. Evo Morales accuse ses opposants d'être à l'origine de cette contestation.
AFP - Des milliers de policiers boliviens ont entamé lundi leur cinquième jour de grève sur fond de revendications salariales et accentuaient la pression sur le président Evo Morales, qui voit dans ce mouvement une manoeuvre de ses opposants visant à déstabiliser le gouvernement.
A La Paz, les policiers grévistes poursuivaient leur occupation d'une caserne de l'Unité tactique d'opérations policières (police anti-émeutes), dont ils avaient délogé les occupants le 21 juin lors d'une opération qui avait dégénéré en violences entre collègues avec un bilan d'au moins trois blessés.
Ce local est situé près de la Place d'Armes, où se trouve la présidence, devant laquelle environ un millier d'autres policiers en civil poursuivaient leur mobilisation lundi.
"Ceci est notre place !", "Dehors les Masistes ! (militants du Mouvement vers le socialisme, MAS, du président Morales), scandaient notamment lundi les manifestants, dont plusieurs avaient le visage masqué dans un pays où les grèves des policiers sont interdites.
Lundi matin, les policiers en grève ont affronté à coups de poings et de bâtons environ 500 membres d'organisations et syndicats pro-Morales sur cette place. Les incidents, qui n'ont pas fait de blessés, ont pris fin lorsque des policiers ont lancé des grenades lacrymogènes pour disperser leurs adversaires, a constaté un journaliste de l'AFP.
En face, le bâtiment de la présidence restait portes closes, et un important détachement militaire était déployé à l'intérieur, selon des sources concordantes.
La veille, le ministre de l'Intérieur Carlos Romero avait annoncé la signature d'un accord avec un syndicat de policiers non gradés, incluant une prime de 32 dollars (25 euros) et des réformes du régime de retraite, et le syndicat avait alors appelé les grévistes à regagner leur poste et cesser leur mouvement.
Mais les policiers de La Paz ont refusé d'obtempérer. Ils ont répété leurs revendications: un salaire minimum de 2.000 bolivianos (quelque 287 dollars, soit 70% de plus de ce qu'ils perçoivent actuellement), la retraite avec plein salaire et l'annulation de la loi leur interdisant de manifester.
"Intentions putschistes"
Face à ce mouvement qui fait progressivement tache d'huile en province, le gouvernement socialiste d'Evo Morales accuse ses opposants, comme il le fait souvent, d'être à l'origine de cette contestation pour le déstabiliser.
La Bolivie est agitée depuis plusieurs mois par la mobilisation de divers secteurs sociaux (mineurs, médecins, policiers, indiens...).
"Il y a des forces obscures avec des intentions putschistes", a assuré lundi le vice-président Alvaro Garcia, désignant des mouvements de droite sans toutefois les nommer.
Dimanche, le président était allé jusqu'à affirmer que certains voulaient "tuer" le ministre de l'Intérieur et attaquer les forces armées "avec des cocktails molotov".
Le vice-président soupçonne même une entente entre les grévistes et les leaders d'une marche d'Indiens amazoniens opposés à un projet routier à travers une réserve naturelle, qui doit arriver mardi dans la capitale bolivienne, avec la bienveillance de son maire de droite Luis Revilla.
Le leader des marcheurs, Fernando Vargas, a démenti ces accusations, assurant n'avoir pour seule motivation que la défense du territoire indigène.
Mais les proches de M. Morales ont déjà lancé un appel aux mouvements paysans et syndicaux proches du pouvoir pour venir à La Paz défendre "leur" président.
Les observateurs craignent une réédition des affrontements de lundi, mais sous une forme plus brutale.