Acte malveillant, incendie volontaire, foudre ou encore chute d'une météorite sont quelques-unes des nombreuses pistes étudiées par les experts en cinq ans d'instruction. L'accident chimique lié à des négligences a finalement été retenu.
AFP - Explosion accidentelle ou criminelle? Entre ces deux hypothèses, les magistrats de l'enquête sur les causes de la catastrophe de l'usine AZF à Toulouse ont rapidement privilégié la première, concluant en mai 2006 à un accident chimique lié à des négligences.
Les experts ont passé au crible de nombreuses pistes en cinq ans d'instruction: acte malveillant, incendie volontaire, détonation d'une munition enterrée, chute d'une météorite ou d'un débris d'avion, foudre, fuite de gaz, dysfonctionnement électrique ou présence d'un aéronef en vol ayant un lien avec l'explosion.
Survenue dix jours après les attentats du 11 septembre 2001 à New York, la catastrophe a immédiatement conduit à l'évocation d'une action terroriste.
Cette hypothèse, largement médiatisée, reposait notamment sur une note des renseignements généraux du 3 octobre 2001, signalant qu'un manutentionnaire d'origine maghrébine décédé dans la catastrophe portait plusieurs couches de sous-vêtements, à la façon d'islamistes radicaux ayant commis des attentats suicides.
Un appel téléphonique anonyme à un policier toulousain annonçant, la veille de la catastrophe, l'arrivée à Toulouse d'un Algérien "spécialiste en explosifs issu des milieux islamistes" a également alimenté cette thèse.
Cette hypothèse a vite été délaissée par les enquêteurs, qui ont souligné qu'aucune trace de substances explosives à usage civil ou militaire n'avait été retrouvée sur place. Les experts ont également noté l'absence de signes d'un incendie qui aurait pu déclencher l'explosion.
Ils ont réfuté bien d'autres hypothèses, dont celles évoquant une détonation spontanée d'une munition enterrée sous le hangar, une fuite souterraine de gaz inflammable, la chute d'une météorite, d'une pièce d'aéronef ou l'effet de la foudre.
L'hypothèse d'un dysfonctionnement électrique, court-circuit ou arc électrique, sur le site d'AZF ou son proche environnement, notamment le site voisin de la Société nationale des poudres et explosifs (SNPE), n'a pas résisté aux analyses techniques et scientifiques.
Quant aux témoignages faisant état de deux explosions au lieu d'une seule, les experts les ont expliqués par un "double bang" issu d'une même explosion.
Selon le rapport final d'expertise, l'explosion a été déclenchée par un mélange malencontreux de quelques kilogrammes de DCCNa (dichloroisocyanurate de sodium, produit chloré) avec 500 kg de nitrate d'ammonium pelletés par une benne et déversés sur un tas de quelque 300 tonnes de nitrate d'ammonium stockés dans un hangar, un quart d'heure avant l'explosion.
"La mise en contact des deux composants a permis la formation de trichlorure d'azote, assimilable à un explosif primaire qui a entraîné la détonation du tas de nitrate d'ammonium", indique le rapport qui dénonce des "négligences et manquements en série" et une "méconnaissance de la réelle dangerosité des nitrates" au sein de l'usine.
Total a rejeté ce scénario, affirmant que "toutes les explosions répertoriées impliquant du nitrate sont la conséquence soit d'un incendie d'une longue durée en milieu confiné, soit d'un amorçage volontaire". L'explosion "demeure encore, à l'heure actuelle, une énigme", estime Total.