, envoyé spécial au Maroc – Nichée dans un immeuble discret de Rabat, la station Hit Radio s'est affirmée comme le porte-parole des jeunes Marocains et participe à sa façon aux élections législatives du 25 novembre. Reportage.
Créée en 2006 à Rabat, Hit Radio revendique le titre de station la plus écoutée par les jeunes Marocains. Forte d'une cinquantaine de salariés, cette radio privée "100% hit et 100% jeunes" s'est forgée une légitimité auprès de ses auditeurs en transformant son antenne en un espace d'expression sans précédant dans le royaume chérifien. Au-delà de sa programmation musicale originale, elle est engagée sur tous les fronts : émissions de libre antenne, soutien d'initiatives citoyennes, création de forums de débat sur la Toile et forte présence sur les réseaux sociaux. Aujourd'hui, sa voix est aussi présente sur le terrain de la politique marocaine.
A l'occasion des élections législatives du 25 novembre, Hit Radio participe, à sa manière, à la campagne en encourageant ses auditeurs à s'inscrire sur les listes électorales. Ainsi, le concours "Souwwer ou souwwet" ("Filme et vote") lancé au cours du mois d'octobre par la station et le Festival du court métrage marocain invitait les auditeurs à réaliser un "film citoyen d'appel au vote". Plus d'une centaine de vidéos ont été envoyées. Le lauréat, originaire de la ville de Meknès, a été désigné le 19 novembre. Son film a été visionné plus de 100 000 fois en ligne.
Momo est l'animateur vedette de la radio fondée par Younes Boumehdi. Âgé de 28 ans, il confie que "le succès de l'opération 'Souwwer ou souwwet' démontre le dynamisme des jeunes Marocains, leur volonté de faire changer les choses et surtout leur intérêt croissant pour la politique". Chargé de la matinale entre 8h et 10h, "le prime-time de la radio", très écouté par les 15-25 ans, il assure que le Maroc n'est pas resté à l'écart du printemps arabe. Même si le changement s'est fait petit à petit et en douceur.
"Le vote est le premier pas vers le changement"
"La nouvelle Constitution, validée par referundum en juillet, a modifié la règle du jeu politique et responsabilisé la classe politique, ce qui prouve la volonté de changer les choses au plus haut niveau du royaume." Si Momo concède que les dirigeants du pays ont du mal à comprendre les besoins des jeunes, il se déclare optimiste et plein d'espoirs "car le vote est le premier pas vers le changement". Les auditeurs de Hit Radio expriment, selon lui, toujours les mêmes inquiétudes concernant le chômage, l'éducation, la corruption et la santé. "Ces revendications sont justes, la balle est dans leur camp, à eux de choisir un candidat, un parti et un programme qui répondent le plus à ces attentes."
Du haut de ses 24 ans, Faty, l'animatrice de la tranche horaire suivante (10h à 14h) au débit vocal énergique, que ce soit en arabe populaire ou en français, se montre plus pessimiste. Originaire de Casablanca, à l'instar de Momo, cette jeune femme a fait le tour du Maroc et parle en connaissance de cause. "Je ne ressens pas l'ambiance des législatives, ni dans la rue ni dans les médias. Cette campagne se résume à une distribution de tracts par les candidats", assure-t-elle. Au lieu de promesses, elle souhaite que la classe politique présente des programmes réalistes et surtout qu'elle se renouvelle "afin que les jeunes se sentent concernés".
Elle encourage cependant elle aussi cles jeunes à se rendre aux urnes : "Ils doivent se bouger et voter, sinon leurs voix resteront inaudibles." Notamment pour faire barrage aux islamistes et les empêcher de remporter le scrutin législatif. "Avec eux, on risque de retourner deux siècles en arrière au lieu d'aller de l'avant", conclut-elle, avant de reprendre l'antenne de vive voix.