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Mauritanie : face à l’ennemi invisible

Alors qu’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) monte en puissance, notamment grâce aux armes qui ont disparues dans les arsenaux du colonel Kadhafi, la Mauritanie se dote d’unités spéciales de lutte anti-terroristes. Nous les avons suivies dans une portion interdite du Sahara.

Lutter contre les terroristes avec leurs propres armes, c’est un peu la stratégie mise en place par l’armée mauritanienne pour lutter contre la franchise maghrébine d’Al-Qaïda. Les GSI, groupes spéciaux d’intervention sont des unités très mobiles équipés de puissants pick-up Toyota armés de mitrailleuses lourdes.

Les soldats ne dépendent d’aucune base, ils vivent en permanence dans le désert en se déplaçant au gré des renseignements glanés par les services de renseignement et de la reconnaissance aérienne. Une vie dure dans des zones ou il est impossible de se ravitailler. Impossible non plus de monter un vrai bivouac sans se faire repérer, les hommes dorment à même le sol au plus près de leurs armes, prêts à réagir en cas d’attaque.

Un "no man’s land" de 800 km

Pour améliorer la détection de potentiels terroristes, une large portion du désert mauritanien a été déclarée zone militaire interdite en 2008. Un territoire de 800 km sur plus de 200 km qui coure le long des frontières terrestres du pays. Aucun civil n’a le droit d’y pénétrer, tout véhicule est donc suspect. Le moindre convoi est immédiatement repéré, intercepté et fouillé par les GSI.

Une technique efficace mais couteuse, auparavant, cette zone désertique était parcourue par des bergers nomades et des caravanes. Aujourd’hui elle est totalement vide. Les trafiquants ont également cessé toute activité, la zone était un carrefour du trafic de drogue, de carburant et de cigarettes...  Des activités qui finançaient Al-Qaïda.

Malgré la création de cette zone tampon des attaques ont toujours lieu sur le sol mauritanien. En début d’année, la police à déjoué deux attentats à la voiture piégés aux portes de Nouakchott. Au mois de juin, l’armée à détruit une base d’Al-Qaïda au Mali à quelques kilomètres à peine de la frontière. En représailles l’organisation a lancé l’assaut sur une base de l’armée mauritanienne avec une vingtaine de pick-up le 5 juillet. La Mauritanie n’a donc pas encore réussi à éradiquer complètement Aqmi sur son territoire.

"Le Cemoc au point mort"

Seule solution pour en finir avec Aqmi : une vraie mobilisation des pays du Sahel. C’est l’objectif du Cemoc, le comité des états-majors opérationnels conjoints, qui regroupe les armées d’Algérie, du Mali, de Mauritanie et du Niger. Un effort malheureusement insuffisant.

Selon Mohamed Mahmoud Aboulmaaly, redacteur en chef du journal "Nouakchott Infos" et spécialiste d’Aqmi : "le groupe de Tamanrasset est presque en panne. Ils n’ont rien fait sur le terrain, il y a des réunions, il y a une coordination, la Mauritanie intervient au Mali. Le Mali se contente d’accepter qu’il y ait des combats sur son territoire. L’Algérie se contente de mettre en garde contre la présence Française et de n’accorder aucun soutien, idem pour le Niger. Les intérêts de ces pays sont totalement divergents. »

Aqmi dispose aujourd’hui de missiles sol-air

Une situation qui profite à Aqmi qui s’ancre de plus en plus au nord du Mali, dans les zones contrôlées par les rebelles touaregs. Selon certains observateurs, l’organisation mène aujourd’hui des actions humanitaires pour gagner le soutien de la population. Elle dispose de réseaux d’informateurs et cultive des liens avec certaines factions touarègues.

Aujourd’hui les services de renseignement mauritaniens affirment qu’une partie des armes "perdues" lors de la révolution libyenne sont aujourd’hui entre les mains d’Aqmi. Ils parlent de missiles sol-air de type Sam7 capable d’abattre un avion de ligne dans les phases de décollage et d’atterrissage. De quoi donner des sueurs froides aux responsables de la région.