Au lendemain de l’épilogue d’une campagne néo-zélandaise tumultueuse, l’heure est au bilan pour le XV de France. Malmenée depuis le début de la compétition, l’image des "Frogs" a retrouvé, dimanche, un peu de sa superbe.
À défaut de soulever le trophée Webb-Ellis, dimanche à Auckland, les Bleus ont convaincu qu’ils avaient toujours la capacité de surprendre et de contester n’importe quelle équipe sur un match. Une première depuis de longs mois. Au centre des critiques depuis le début du Mondial, Marc Lièvremont et ses hommes ont longtemps courbé l’échine, trop conscients de leur incapacité à répondre aux attaques sur le terrain. Mais dimanche, face aux All Blacks, la France a regagné son honneur.
Et les médias internationaux, si prompts à tirer à boulets rouges sur les Bleus depuis plusieurs semaines, ont rendu hommage aux guerriers retrouvés. "L’attitude combative des Français face au haka a personnifié leur approche imprévue et inspirée de la finale couperet d’hier […]. Après tout, la France était supposée se faire balayer avec 20 points d’écart", constate le chroniqueur du "Dominion Post" Liam Napier.
Le "New Zealand Herald", qui n’avait pas été tendre avec les Bleus au lendemain de la demi-finale remportée face aux Gallois, revoit lui aussi sa copie. Wynne Gray, l’un de ses chroniqueurs phares, estime que les hommes de Marc Lièvremont leur "ont provoqué une frayeur beaucoup plus grande que celle [qu’ils] pouvaient imaginer". Et de colporter une nouvelle fois le mythe de ces Bleus et leur "capacité à renaître de leurs cendres".
Dusautoir superstar
Pour Dylan Cleaver, du "New Zealand Herald", même si la France a été "rarement menaçante", elle a considérablement revisité le "script que les All Blacks avaient écrit eux-mêmes". Il évoque "l’implication absolue" des Bleus pour "bloquer les passes rapides" des Néo-Zélandais et insiste sur la performance du capitaine des Bleus et homme du match Thierry Dusautoir, "le plus brillant des joueurs sur le terrain" dimanche soir.
Dans ces mêmes colonnes, le journaliste David Leggat rend lui aussi un hommage appuyé au "formidable" capitaine français, sacré ce lundi matin meilleur joueur de l'année par l'International Rugby Board (IRB), l'instance suprême du rugby international.
En Écosse, en Irlande, en Angleterre ou en Australie, les médias sont unanimes aussi. Portés par leur capitaine courage, les Bleus ont retrouvé des couleurs. Statistiquement, déjà, les Bleus ont existé, note Paul Rees, dans "The Irish Times" : "La France était méconnaissable, en comparaison à celle qui a arraché sa victoire contre des Gallois réduits à 14 en demi-finale." Il constate que ces Bleus, qui avaient fait 55 passes face au Pays de Galles, en revendiquent cette fois 145, et met en lumière l’excellente performance des trois-quarts : "Leurs trois-quarts ont porté le ballon sur 115 mètres contre seulement 14 huit jours plus tôt."
Une solidarité retrouvée
Le service des Sports du journal britannique "The Independent", sous la plume de James Lawton, est moins factuel : "Si la Coupe du monde de rugby est l’affaire d’une soirée, s’il était possible qu’un seul homme comme Thierry Dusautoir puisse la revendiquer personnellement, le trophée serait drapé aujourd’hui du drapeau tricolore et ferait route vers les Champs-Élysées." Lawton rend hommage aux "virtuoses du dernier chapitre" du Mondial et, s’il reconnaît l’inconstance de ce XV de France, il s’interroge : "Que serait le rugby sans eux ?"
Même son de cloche côté écossais. Dans l’édition en ligne du "Scotsman", David Ferguson souligne le "passionnant renouveau" des Français qui a "résulté en une finale bien plus disputée que ne le laissait entrevoir leur campagne balbutiante".
Le revirement se propage même chez les plus irréductibles réfractaires au rugby français. Wayne Smith, l’envoyé spécial de "The Australian" à Auckland, loue lui aussi la solidarité retrouvée du pack tricolore : "Le camp français, dans son intégralité, s’est regroupé autour de Dusautoir pour mener le combat jusqu’à son terme."
Enfin, le sud-africain News24 résume le sentiment général d’une formule aussi simple que frappante : "La France renoue avec sa fierté dans la défaite." Mais les Bleus, malmenés ces dernières semaines dans les éditoriaux internationaux, auront vraisemblablement du mal à goûter pleinement à ce retour en grâce médiatique.