"The Artist", film muet en noir et blanc qui a valu à Jean Dujardin le prix d'interprétation masculine à Cannes, sort ce mercredi dans les salles françaises. Un vibrant hommage au cinéma des années 1920-1930.
AFP - Avec "The Artist", film muet en noir et blanc qui sort mercredi, le réalisateur Michel Hazanavicius et ses acteurs, Jean Dujardin et Bérénice Béjo, offrent un numéro de claquettes virtuose qui fait entrer Dujardin dans la cour des grands.
Présenté en compétition à Cannes, le film, qui a valu un prix d'interprétation à Jean Dujardin,
avait été salué par de nombreux éclats de rires et des applaudissements nourris, malgré - ou grâce - à son format inhabituel.
"C'était une vraie belle idée qui était sous le nez de tout le monde et qui a réussi", notait l'acteur au soir de son triomphe.
Le réalisateur reconnaît qu'il a beaucoup travaillé ses classiques pour raconter cette histoire de destins croisés qui revisite celle du cinéma : le crépuscule d'une star du cinéma muet (Jean Dujardin), orgueilleuse et pathétique, et l'ascension d'une jeune étoile du parlant (Bérénice Béjo), ambitieuse, pétillante et amoureuse.
"J'avais envie de me coller à cette manière de raconter une histoire et la chance de reprendre là où de grands réalisateurs s'étaient arrêtés, en 1927, mais avec les 80 ans d'expériences techniques du cinéma", a expliqué Michel Hazanavicius.
Enfant chéri du cinéma français après ses deux cartons au box-office, les "OSS 117", "Le Caire, nid d'espions" et "Rio ne répond plus", déjà avec Jean Dujardin, il s'est nourri des grands noms du muet: Murnau, Fritz Lang ou Frank Borzage, avec la volonté d'éviter le pastiche ou l'ironie.
D'où la teinte douce amère qui accompagne la dégringolade artistique et sociale de George Valentin, son héros, et les doutes et le chagrin qui escortent la montée au firmament de Peppy Miller, sa ravissante rivale (également l'épouse du metteur en scène).
Les poches de Gene Kelly
"J'ai fait beaucoup d'emprunts, de citations, d'hommages et quelques vols purs et simples" aux grands anciens, avoue simplement le cinéaste.
"Moi aussi, j'ai fait les poches de Gene Kelly", renchérit Jean Dujardin qui a pris six mois de cours de claquettes avec sa partenaire pour peaufiner la scène de la fin, clin d'oeil ambitieux et réussi à "Chantons sous la Pluie".
"On ne voulait surtout pas se faire doubler. On a fait 17 prises et la 11ème s'est avérée la bonne", a insisté la jeune femme, qui s'était aussi imposé le visionnage de centaines de scènes de ses glorieuses aînées, Joan Crawford, Gloria Swanson ou Marlène Dietrich - dont elle a étudié les clins d'oeil.
L'image a été travaillée avec un soin infini pour un rendu noir et blanc où chaque ombre, chaque cadre a été réfléchi et exigé par le réalisateur, qui explique aussi avoir "tourné en 22 images/secondes, soit un léger accéléré, pour restituer la saveur des années 20".
Pour autant, "The Artist" n'est pas une excursion au musée du cinéma : "c'est une comédie populaire, pas un exercice de style", insiste Hazanavicius, qui s'est offert un vrai plaisir de cinéphile en tournant à Hollywood "dans le lit de Marie Pickford, le studio de Charlie Chaplin, le cinéma de l'avant-première des +Temps Modernes+"...
"Les Américains étaient touchés que des Français racontent leur histoire dans un format qu'eux ne peuvent pas produire", se souvient-il, ce qu'a encore confirmé l'accueil réservé à "The Artist" au festival de Toronto le mois dernier.
D'autant qu'en terme de prestation, celle du chien Uggy, l'un des acteurs majeurs du film, a apporté une contribution remarquée et saluée par ses partenaires: un vrai pro qui sait mourir en beauté et sonner la police. "Pour deux hot-dogs, on obtient tout de lui", assure Hazanavicius. Même une virée en skate-board.