Les enfants du rock sont-ils en train de se transformer en requins du business ? Depuis quelques années, la concurrence entre festivals de rock oblige certains organisateurs à recourir aux techniques de marketing les plus agressives. Le Journal de l’Intelligence Economique d’Ali Laïdi s’est penché sur ce nouveau business dont le slogan pourrait être "faîtes la guerre économique et pas l’amour".
Avec 48 festivals cet été, la compétition entre festivals devient rude. Et elle n’épargne pas les festivals historiques comme les Eurockéennes de Belfort (dans l’est de la France). Avec pourtant 23 éditions à leur actif et 90 000 spectateurs cette année, le co-programmateur du festival rock le reconnaît: les temps sont de plus en plus difficiles pour les festivals qui doivent se battre et redoubler d’astuces pour attirer le plus de spectateurs.
Signer de gros chèques est de plus en plus la méthode utilisée par certains organisateurs pour se démarquer de leurs concurrents et attirer le plus grand nombre de stars. Et pour cause, le prix des stars est soumis comme n’importe quel produit à la loi du marché de l’offre et de la demande. Avec un nombre de festivals croissant chaque année, il faut donc mettre les moyens. C’est la voie qu’a emprunté le festival Main Square d’Arras (nord de la France) qui se déroule d’ailleurs le même week-end que les Eurockéennes. Piloté par la multinationale américaine Live Nation, leader mondial dans l’organisation de concert, il a rassemblé cette année plus de 100 000 festivaliers pour un budget total tenu secret. Sa tirelire sert à se payer des artistes en exclusivité, histoire de se distinguer des concurrents. Ce qui implique que ces artistes ne peuvent aller jouer ailleurs. C’est ainsi que le festival a monopolisé le groupe britannique Cold Play pour toute l’année 2011.
Malgré cette concurrence financière, de nouveaux venus ne renoncent pas à se lancer dans l’aventure. C’est le cas de Musilac à Aix-les-Bains en Savoie. En 10 ans d’existence, le festival a su s’imposer dans la région Rhône-Alpes. Et le succès est au rendez-vous : 80 000 festivaliers en 2011. 4 fois plus que lors des premières éditions. Pourtant ce n’était pas facile d’attirer sur scène des artistes comme Morcheeba, Santana, Ben Harper ou PJ Harvey qui apprécie les petits festivals locaux. La chanteuse anglaise admet que "l’industrie du spectacle se transforme rapidement avec d’un côté les gros festivals et de l’autre les festivals locaux. Mais au final, le public est là pour la musique".
Une vision peut-être un peu angélique alors que le triptyque business, sex and rock’n roll est en train de s’imposer de plus en plus.