Couac dans les relations commerciales entre l'Allemagne et l'Iran. Berlin a dû, sous pression des États-Unis et d'Israël, mettre un terme à son rôle d'intermédiaire entre l'Inde et l'Iran pour l'achat de pétrole.
L’Inde ne pourra plus acheter de pétrole iranien via l’Allemagne. Berlin a décidé, mardi, de mettre un terme à une trouble relation commerciale qui avait provoqué l’ire d'Israël et des États-Unis.
Jusqu’à présent, la Bundesbank et la Europäisch-Iranische Handelsbank (EIHB), basée à Hambourg, servaient d’intermédiaires entre New Dehli et Téhéran, avait révélé en fin de semaine dernière le quotidien économique Handelsblatt. L’Inde, qui achète pour 9 milliards de dollars par an de pétrole à l'Iran, versait l'argent à la banque centrale allemande qui chargeait ensuite EIHB d’acheter l'or noir à l'Iran. L’Inde évitait ainsi de froisser son allié américain, avec la complicité de Berlin.
Washington n’a pas tardé à réagir à ces révélations. En début de semaine, l’administration américaine s’est plainte de cette transaction auprès du gouvernement allemand. Cible de son mécontentement : EIHB, une société détenue à 52 % par une banque nationale iranienne. L'établissement est, depuis 2010, sur la liste noire américaine des sociétés soupçonnées d’aider Téhéran à contourner les sanctions internationales. Israël en a demandé l'interdiction aux Allemands.
Berlin avait dans un premir temps tergiversé, soulignant que EIHB agissait en toute légalité en Allemagne et qu'elle était soumise à un contrôle très strict des autorités financières. Finalement, le gouvernement a cédé, ordonnant mardi à sa banque centrale de fermer le robinet.
Il semblerait, en outre, que ce commerce à trois bandes soient le résultat d’un marchandage entre le gouvernement allemand et iranien. L’Allemagne a, en effet, donné son feu vert pour cette opération début février, quelques jours seulement après la libération de deux journalistes allemands détenus en Iran.
"La qualité plus que la quantité"
L’affaire pouvait difficilement tomber à un plus mauvais moment pour Angela Merkel. Elle avait déjà été critiquée pour ses réticences à participer à des opérations militaires contre la Libye. Mais cette transaction remet aussi en avant l’importance des relations économiques entre l’Allemagne et l’Iran.
L’Allemagne est le premier partenaire commercial européen de l’Iran et le deuxième mondial derrière les Émirats arabes unis. Ses exportations ont atteint 3,8 milliards de dollars en 2010, une augmentation de près de 5 % par rapport à 2009. Entre janvier et octobre de l’année 2010, les importations depuis l’Iran ont progressé de 28 %.
"Mais plus que la quantité des exportations c’est la qualité des produits livrés qui importe", souligne à FRANCE 24 Sami Alfaraj, président du Centre d’études stratégique à Koweït, spécialisé dans la région du Golfe. La plupart des entreprises allemandes impliquées en Iran sont spécialisées dans les produits de haute technologie.
Le géant allemand Siemens avait, ainsi, contribué au système informatique des installations nucléaires iraniennes. Le groupe a annoncé en 2009 qu’il se retirait d’Iran. Au total, 200 sociétés allemandes étaient actives en Iran en juillet 2009, d’après une liste établie par la Chambre de commerce germano-iranienne. Des relations commerciales parfois très douteuses selon le politologue allemand Matthias Küntzel qui les a analysées l’an dernier. Il se demande quel type de service une entreprise comme Babcock Borsig Service GmbH, spécialisée "dans la technologie nucléaire", peut bien fournir à Téhéran.
En 2008, le porte-parole de la National Petrochimical company iranienne s’était félicité de la facilité qu’il avait "de trouver auprès d’autres pays que les États-Unis les produits dont [il] avait besoin". Il avait cité quatre noms d’entreprises, dont trois sont allemandes.