Antonio Caiazzo, le "parrain historique" du clan camorriste Vomero, a été arrêté à Madrid. Son bras droit, Francesco Simeoli (photo), a également été pris lors du coup de filet effectué par les polices espagnole et italienne.
AFP - Un chef de clan de la Camorra et son bras droit ont été interpellés près de Madrid, après une série d'arrestations qui illustrent l'intense activité des mafieux italiens en Espagne, marché de gros de la drogue pour l'Europe et paradis ensoleillé du blanchiment.
Antonio Caiazzo, 50 ans, "parrain historique" du clan Vomero, et Francesco Simeoli, 40 ans, ont été cueillis lundi soir au sortir d'un restaurant d'une zone commerciale de Majadahonda, banlieue de la capitale espagnole, ont annoncé mardi les polices espagnole et italienne.
Le premier était en fuite depuis mars 2007, à la suite d'une condamnation à 12 ans de réclusion par le tribunal de Naples. Il est considéré comme le "boss" d'un clan camorriste implanté dans les quartiers Vomero et Arenella de Naples.
Simeoli, son bras droit présumé, était lui aussi en fuite, depuis juin 2007, sous le coup d'un mandat d'arrêt italien qui concernait aussi Caiazzo et une trentaine d'autres membres de ce clan.
Une dizaine de responsables de la Camorra ou d'autres mafias italiennes ont été interpellés depuis 2006 en Espagne, principale porte d'entrée en Europe de la cocaïne sud-américaine et du haschisch marocain.
Caiazzo était réfugié en Espagne car c'est "aujourd'hui le principal carrefour international du trafic de haschisch et de cocaïne", a commenté Vittorio Pisani, un responsable de la police de Naples, cité par l'agence Ansa.
"La Camorra et les cartels colombiens travaillent ensemble en Espagne", avait déclaré le 19 janvier au journal El Pais un policier italien, trois jours après l'arrestation à Barcelone d'un responsable camorriste, Salvatore Zazo.
Zazo dirigeait depuis l'Espagne "l'importation d'énormes quantités de cocaïne de la Colombie vers Naples" grâce à une "amitié forgée en Espagne, entre la Camorra, la criminalité locale et les cartels latino-américains", expliquait Gaetano Maruccia, responsable des carabiniers à Naples,
"Le crime organisé napolitain a créé des bases logistiques dans certaines grandes villes espagnoles, et y dispose de nombreux membres importants en fuite et d'un ample réseau de collaborateurs", ajoutait Maruccia.
La Camorra est une nébuleuse de plusieurs dizaines de familles souvent rivales qui compteraient 5.000 membres. Elle se consacre au trafic de drogue et d'armes, à la prostitution, au racket, ou encore au trafic de déchets toxiques, aux travaux publics ou à la grande distribution.
Selon un décompte de l'écrivain italien Roberto Saviano, auteur menacé du best-seller "Gomorra", la Camorra a fait 3.600 morts depuis 1979, "plus de victimes que l'ETA et l'IRA réunies, que la mafia russe, les familles albanaises, les Brigades rouges et tous les attentats commis en Italie durant les années de plomb".
Les liens tissés en Espagne entre cartels colombiens et mafias italiennes ou d'Europe de l'est, apparaissent souvent au détours des opérations de police.
En mai 2008, un trafiquant de drogue de la mafia calabraise avait ainsi été arrêté en Espagne avec sa compagne colombienne et 40.000 doses de cocaïne.
"L'Espagne a été envahie par l'argent de la Camorra", avait affirmé en 2006 Roberto Saviano dans une interview en Espagne. Sur la Costa del Sol et aux Canaries, "plusieurs hôtels et complexes touristiques ont été construits avec l'argent et le ciment" de l'organisation mafieuse, assurait-il.
Immobilier, tourisme, discothèques: "l'Espagne est considérée par beaucoup de mafieux comme le meilleur endroit où se cacher sans interrompre leurs activités", ajoutait Saviano.