"Nous sommes confrontés, de la part d'élus, à une rhétorique déshumanisante et cruelle, notamment envers les populations immigrées. Les habitants de Miami en avaient assez". C'est par ces mots qu'Eileen Higgins s'est exprimée auprès d'Associated Press après avoir remporté, mardi 9 décembre, l'élection municipale de Miami.

Cette démocrate de 61 ans a remporté mardi la mairie de la deuxième ville de Floride. Elle a récolté 60 % des suffrages face au candidat républicain Emilio T. Gonzalez, soutenu par Donald Trump, selon les projections de CNN et du quotidien The Miami Herald. Grâce à cette victoire, elle devient la première femme à la tête de Miami et la première représentante démocrate depuis 28 ans dans la capitale financière de la Floride - un État qui a majoritairement voté Trump aux trois derniers scrutins présidentiels.

"Notre ville a choisi une nouvelle voie", a souligné Eileen Higgins face à la foule lors de la soirée électorale.  "Vous avez choisi la compétence plutôt que le chaos, les résultats plutôt que les excuses et une administration municipale qui travaille enfin pour vous", a-t-elle insisté.

Originaire du Nouveau-Mexique, cette ingénieure en mécanique de formation et ancienne directrice du Corps de la Paix au Belize, a remporté sa première élection en 2018. "Cette militante communautaire, alors inconnue du grand public, s'était présentée à un siège vacant de commissaire du comté de Miami-Dade, représentant une partie de la ville de Miami. Parlant couramment espagnol, elle s'est présentée sous le surnom de 'La Gringa' (Un terme utilisé par les hispanophones pour désigner les Américains blancs, NDLR)  et a surfé sur la vague anti-Trump durant le premier mandat du président pour remporter une victoire qui a stupéfié le monde politique", raconte le Miami Herald.

Une élection locale à la dimension nationale

Après avoir remporté deux autres mandats, elle a quitté son poste au conseil du Comté pour se présenter à la mairie de Miami. "Bien que les élections à Miami soient officiellement non partisanes, les deux principaux partis politiques ont participé à la campagne. Le président Trump a apporté son soutien à Emilio T. Gonzalez, et le Comité national démocrate a soutenu Eileen Higgins", souligne le New York Times.

Lors de sa campagne, la "Gringa" a mis l'accent sur "la restauration de la confiance du public et la promesse d'une direction plus sereine et collaborative à la mairie", comme le rapporte CBS News. Eileen Higgins a également axé son programme sur l'accessibilité au logement abordable. Comme l'explique USA Today, après la pandémie de COVID-19, "Miami a en effet vu affluer New-Yorkais et Californiens. Cet afflux a entraîné une flambée des coûts de la vie et du logement pour les résidents".

Même si Eileen Higgins et son adversaire Emilio T. Gonzalez ont cherché à mettre surtout en avant les préoccupations locales durant la campagne, celle-ci a rapidement pris une dimension nationale. La nouvelle mairie s'est ainsi exprimée à plusieurs reprises dans cette ville à majorité hispanique au sujet de la politique d'immigration de Trump, affirmant avoir entendu de nombreux habitants de Miami inquiets pour leurs proches détenus. Le Wall Street Journal explique que les démocrates ont aussi cherché à associer Gonzalez au locataire de la Maison Blanche, exhortant notamment les électeurs, dans un tract, à "Faire passer un message clair : le soutien de Trump sera rejeté à Miami !".

"Un nouveau signal d’alarme pour les Républicains"

Cette victoire vient prolonger une série de succès démocrates. Ils ont notamment remporté cet automne les élections de gouverneur en Virginie et au New Jersey, ainsi que la mairie de New York. "Le résultat de ce soir est un nouveau signal d'alarme pour les Républicains : les électeurs en ont assez de leur programme déconnecté des réalités et qui fait grimper les coûts" a ainsi déclaré Ken Martin, président du Comité national démocrate, dans un communiqué.

Cette élection locale n'est pas prédictive des résultats des élections de mi-mandat de l'année prochaine, mais elle donne un certain élan aux démocrates. "Au début de l'année, quand certains disaient que le Parti démocrate était mort, au lieu de nous lamenter, nous avons décidé de reconstruire, et c'est ce que nous faisons. Il s'agit simplement de reconstruire et de montrer à notre communauté que nous ne la décevrons pas", a insisté Eileen Higgins. 

Le Parti républicain cherchera quant à lui à conserver son emprise en Floride, où le président républicain passe la plupart de ses week-ends dans sa résidence de Mar-a-Lago. La région de Miami sera également dans la lumière en 2026. À Doral, ville voisine, le président américain accueillera le sommet du G20 dans son complexe de golf. Sept matches du Mondial de football vont aussi se dérouler à Miami l’été prochain. Même si Donald Trump essayera de tirer la couverture à lui, ce rayonnement international pourra conférer à Eileen Higgins une tribune importante en tant que maire.

Avec AP