Alors que la mobilisation contre la réforme des retraites menace de se durcir, le ministre du Travail, Éric Woerth, a consenti à faire un geste en direction des 130 000 mères de famille ayant cesser le travail pour élever leurs enfants.
REUTERS - Le gouvernement a fait jeudi un geste sur les retraites en faveur des parents ayant arrêté de travailler pour élever leurs enfants dans l’espoir d’étouffer la radicalisation en cours de la contestation de sa réforme.
Cette mesure, proposée par Nicolas Sarkozy en accord avec sa majorité parlementaire, bénéficierait à 130.000 mères de famille, a précisé le ministre du Travail, Eric Woerth, lors du débat au Sénat sur un projet de loi rejeté par les syndicats et une large partie de l’opinion.
Le gouvernement lâche ainsi du lest avant une nouvelle journée de manifestions prévue mardi prochain et alors que les préavis de grève reconductible se multiplient, notammment dans le secteur de l’énergie et des transports.
L’amendement défendu par Eric Woerth prévoit le maintien pour une période transitoire de cinq ans de la retraite à taux plein à 65 ans, contre 67 dans le projet de loi, pour les mères de trois enfants et plus nées entre 1951, première génération concernée par la réforme, et 1955, sous réserve qu’elles se soient arrêtées de travailler pour élever leurs enfants.
« C’est une mesure forte qui répond à une iniquité réelle et constatée », a déclaré Eric Woerth.
Le ministre, qui pilote le projet de loi sur les retraites, a proposé aux sénateurs un deuxième amendement qui prévoit le maintien à 65 ans de l’âge d’annulation de la décote pour les parents d’enfants lourdement handicapés, une mesure pérenne.
Il s’agit là de modifications du projet qui avaient été prônées par Gérard Larcher, le président UMP du Sénat, où la formation présidentielle ne dispose pas de la majorité absolue sans les voix de ses alliés centristes.
"Rideau de fumée"
« Ceci nous permet d’apporter une réponse à la situation de parents qui sont souvent pénalisés dans leur carrière, en plus de la souffrance liée à la situation de leur enfant », a Eric Woerth.
- Les femmes : Pour prendre en compte les inégalités salariales et les carrières plus courtes des mères de famille, la droite pourrait prévoir des aménagements.
- Le handicap : la majorité pourrait réévaluer les critères pour permettre à un plus grand nombre de travailleurs reconnus handicapés de bénéficier d’un accès à la retraite anticipée.
- La pénibilité : le PS compte "se battre sur la pénibilité" et faire en sorte que celle-ci soit prise en compte branche par branche plutôt qu’individuellement comme prévu dans le projet de loi actuel.
Pour les socialistes, ces deux mesures ne constituent pas une avancée et montrent la gêne du gouvernement face à la résistance que suscite sa réforme, dont la principale mesure est le report de 60 à 62 ans de l’âge légal de départ à la retraite.
« Le gouvernement est embarrassé, il voit bien que la mobilisation ne faiblit pas et ils ont décidé dans un petit-déjeuner à l’Elysée ce type d’intervention qui ressemble pour moi plus à un rideau de fumée qu’à de véritables avancées ou à une écoute de ceux qui manifestent », a ainsi déclaré Jean-Pierre Bel, président du groupe PS au Sénat, sur BFM TV.
Pour financer les mesures proposées, le gouvernement veut augmenter de 0,2% les prélèvements sociaux sur les revenus du capital et aligner le taux des prélèvements forfaitaires sur les plus-values immobilières sur celui des autres revenus du capital.
Selon Eric Woerth, ces deux nouvelles recettes, d’un rendement total de 340 millions, permettront de financer les deux mesures, dont le coût cumulé est estimé à 3,4 milliards d’euros d’ici 2022. Ces deux mesures n’entreront pas dans le calcul du bouclier fiscal, a-t-il précisé.
Ces décisions, a précisé la Présidence de la République dans un communiqué, ont été prises « en plein accord avec la majorité sénatoriale » lors d’une réunion sur la réforme des retraites à l’Elysée en présence, entre autres, du Premier ministre, du ministre du Travail, du président du Sénat et du président du groupe UMP à la chambre haute.
« Ces dispositions en faveur des retraites des parents, en particulier des mères de famille, permettent d’améliorer encore la réforme, comme les travaux conduits avec les députés avaient permis de le faire à l’Assemblée nationale, notamment pour une meilleure prise en compte de la pénibilité,” dit le communiqué.
L’Elysée afffirme par contre qu’il n’est pas question de toucher au coeur d’une réforme dont Nicolas Sarkozy entend faire l’un des symboles de son quinquennat.
“Le relèvement progressif de l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans est une composante essentielle de la réforme”, souligne le texte.