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La crise diplomatique s’envenime entre Tokyo et Pékin

Sur fond d'un incident de pêche mineur de prime abord, la Chine a suspendu dimanche ses contacts de haut niveau avec le Japon. Une crise diplomatique qui pourrait avoir d’importantes conséquences sur la coopération bilatérale.

Relancée par l’arrestation d’un pêcheur chinois dans une zone maritime disputée, la brouille diplomatique entre la Chine et le Japon met sérieusement en péril les relations bilatérales, selon Kerry Brown, spécialiste de l’Asie au sein du 'think tank' britannique Chatham House.

Contacté par France 24, il affirme que Pékin et Tokyo ont besoin de coopérer de manière apaisée pour assurer leur développement et leur sécurité.

"À plusieurs reprises, le Japon, est venu en aide à la Chine sur le plan économique. De plus, les deux pays ont des problèmes en commun - comme l’énergie, les ressources naturelles et la Corée du Nord. Ils sont obligés de continuer à coopérer", assure-t-il. "C’est inquiétant qu’ils puissent se disputer de la sorte autour d’un incident mineur. On espère que leurs diplomates réfléchiront aux moyens d’éviter de tels conflits à l'avenir."

Un incident maritime "mineur"

Dimanche, la justice japonaise a prolongé, jusqu'au 29 septembre, la détention du capitaine d'un bateau de pêche chinois entré en collision avec deux navires des garde-côtes japonais dans les parages d'îles contestées. Cet incident est intervenu au moment où la Chine et le Japon se disputent la souveraineté des îles Diaoyu ("Senkaku" en japonais), un archipel riche en poisson mais aussi, probablement, en hydrocarbures.

La loi japonaise donne dix jours aux autorités pour inculper ou relâcher le capitaine chinois, le reste de l’équipage ayant déjà été remis en liberté. En représailles, la Chine a suspendu les contacts de haut niveau ainsi que des discussions en cours avec le Japon en ce qui concerne le renforcement des relations aériennes entre les deux pays. Lundi, une organisation chinoise a annulé le voyage de 1 000 jeunes Japonais qui devaient passer plusieurs jours à Shanghai.

La dispute est tout à fait sérieuse, selon Kerry Brown. Lequel affirme : "Il y a eu des hauts et des bas ces dernières années, mais jamais Pékin n‘avait suspendu ses contacts de haut niveau avec Tokyo." Et de poursuivre : "Il est difficile de dire comment ils vont s'en sortir. Ils vont devoir faire preuve de tact, car la situation peut facilement devenir incontrolable."

Relents historiques

Les tensions entre la Chine et le Japon sont bien antérieures à cet incident maritime. Les souvenirs de l'invasion de la Mandchourie par les troupes japonaises en 1932 et de l'occupation du nord du pays pendant la Seconde Guerre mondiale sont toujours vivaces en Chine. Un antagonisme qui avait été exacerbé par l’ex-Premier ministre japonais, Junichiro Koizumi, qui s’est fréquemment rendu, entre 2001 et 2006, sur le site d’un mémorial de guerre.

Le sentiment anti-japonais prend de l’ampleur en Chine : un phénomène préoccupant selon Kerry Brown. "Beaucoup de jeunes blogueurs chinois prennent n’importe quel prétexte pour dénoncer une supposée violation de leur souveraineté. Nombreux sont ceux en Chine qui estiment que cet incident est une preuve que leur pays se fait maltraiter."

Côté japonais, de plus en plus de gens sont frustrés par le système politique et l’influence des États-Unis en ce qui concerne les questions sécuritaires. Un mouvement "dangereux" selon Kerry Brown, car il pourrait remettre en question la constitution pacifique du pays.

Tags: Japon, Chine,