
Takeshi Kitano investit Paris durant tout le printemps. Dans un entretien accordé à FRANCE 24, l'artiste japonais raconte combien il est "étrange, presque comique" d'être exposé à Paris, alors que sa mère l'empêchait de peindre.
AFP - Cinéaste singulier respecté à travers le monde, animateur de shows télévisés très populaire dans son pays, le Japonais Takeshi Kitano s'essaie, à Paris, à un exercice original en exposant ses peintures et une série d'objets fantasques sortis de son imagination foisonnante.
Le résultat, plein d'humour - visible à la Fondation Cartier pour l'art contemporain à partir de jeudi et pour six mois - offre une fenêtre décalée et réjouissante sur la culture nippone.
Au même moment, une rétrospective lui est consacrée au Centre Pompidou (11 mars au 26 juin). Intitulée "Takeshi Kitano l'iconoclaste, le cinéaste et l'acteur pour le grand et le petit écran", elle rassemble 40 films, téléfilms et documents.
Son dernier long-métrage, "Achille et la tortue", dernier volet d'une trilogie sur "l'autodestruction de l'artiste", sort par ailleurs en salles cette semaine en France.
Baptisée "Beat Takeshi Kitano, Gosse de peintre", l'exposition rassemble en un seul lieu les deux facettes et les deux noms - l'animateur Beat Takeshi et le réalisateur Takeshi Kitano - de ce personnage inclassable.
Le titre est aussi un clin d'oeil à son père, artisan avant la guerre devenu, après la défaite, peintre en bâtiment, "ouvrier méprisé": "à l'école, on se moquait de moi, c'était humiliant d'être traité de fils de peintre en bâtiment".
Objectif affiché du réalisateur de Sonatine et Hanabi dans cette exposition "pour les enfants et les adultes" : donner une définition du mot "art" qui soit "moins conventionnelle, moins snob, plus décontractée et accessible à tout le monde".
L'humour le dispute à l'irrévérence lorsqu'il présente les plans "des armes secrètes de l'armée impériale japonaise": une vingtaine d'animaux transformés en armes (baleine hydravion, libellule hélicoptère...).
Un peu plus loin, un étrange mannequin montre comment un criminel réussit à échapper à la pendaison - toujours utilisée au Japon - en mordant à pleines dents la corde nouée autour de son cou pour éviter qu'elle ne l'étrangle.
Une série de toiles du cinéaste - naïves, très colorées - sont également exposées.
itPreuve que le réalisateur de "L'été de Kikujiro" n'a pas du tout l'intention de soigner une image d'"intellectuel" en Europe ou de tracer une frontière hermétique avec ses - lucratives - activités d'animateur roi de l'audimat au Japon, il met volontairement en scène ces dernières.
En écartant un petit rideau rouge sous un panneau où est inscrit "Voici le vrai travail de Takeshi Kitano", le visiteur découvre ses émissions sur trois écrans, incrustés au milieu de photos du cinéaste dans des accoutrements - danseuse, extraterrestre, poule géante - plus extravagants les uns que les autres.
"Cet aspect de mes activités n'est pas vraiment connu en Europe, or je veux présenter toutes les facettes de ma personnalité", explique-t-il, jugeant qu'il est "bien plus stimulant et intéressant" de mélanger les disciplines entre elles que de les cloisonner.
Quel message les enfants pourront-ils retirer de cette étonnante exposition d'un humoriste, animateur de télévision et cinéaste de 63 ans qui ne se considère pas comme un "peintre" et affiche, avec une impertinence revendiquée, sa volonté de faire d'abord "sourire" ?
"Peut-être qu'un enfant stupéfait par telle ou telle installation ressentira l'envie de devenir scientifique ? Ou artiste ? Un autre préférera plutôt devenir comédien ?", explique Kitano.