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Cessez-le feu entre Israël et le Hamas : "les Gazaouis ont recommencé à respirer"
Sous les ruines, les Gazaouis tentent de renouer avec la vie après deux ans de bombardements israéliens, tandis que le Hamas tente de resserrer son emprise sur le territoire palestinien et que le calme, imposé par le cessez-le-feu, reste suspendu à un fil. Témoignage.
Des Palestiniens marchent près de bâtiments détruits, le 14 octobre 2025 dans la zone d'al-Zahra dans la bande de Gaza. © Eyad Baba, AFP

Dans la bande de Gaza, le cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, entré en vigueur le 10 octobre, après deux ans de guerre déclenchée par les attaques du mouvement palestinien et ses alliés le 7 octobre 2023, a ramené un calme relatif. Mais même si l’aide humanitaire commence à affluer, les Gazaouis restent confrontés à des destructions massives des infrastructures et à une insécurité persistante.

"La situation commence à s’améliorer ; elle est bien meilleure qu'il y a une semaine, on peut dire que les Gazaouis ont recommencé à respirer", confie Bahaa Zaqout. Interrogé sur l’antenne anglophone de France 24, le travailleur humanitaire qui réside à Deir al-Balah ajoute "qu’ils sont soulagés par le retour au calme" imposé par le plan Trump.

Il affirme même qu’à Deir el-Balah, la nourriture est disponible en quantité et à des prix qui "se sont considérablement améliorés" ces derniers jours, alors que fin août, l'ONU avait déclaré une famine dans plusieurs zones du territoire palestinien, ce que contestait le gouvernement israélien.

"Pour la première fois depuis la cessation de toutes les actions militaires, les organisations humanitaires peuvent acheminer de l'aide à Gaza et y faire entrer des camions à un bon rythme et sans qu’ils ne soient pillés, rapporte-t-il. C'est un très bon signe, et nous espérons que ce rythme se maintiendra."

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Des camions transportant l'aide humanitaire préparée par le Croissant-Rouge égyptien attendent d'entrer dans la bande de Gaza par le poste-frontière de Rafah, à Al-Arish en Égypte, le 14 octobre 2025. © Stringer, Reuters

L’armée israélienne, qui contrôle tous les accès à la bande de Gaza, autorise l'acheminement de l'aide humanitaire essentiellement via le passage de Kerem Shalom (sud), le plan de Donald Trump prévoyant une augmentation significative de l'aide dès l'arrêt des combats.

Dans la journée, les autorités israéliennes ont indiqué que la date d'ouverture du passage de Rafah, point frontalier pourtant vital entre l'Égypte et le territoire palestinien pour l’acheminement de l'aide humanitaire, serait annoncée "ultérieurement" et "uniquement" pour la "circulation des personnes".

"Se préparer à affronter l'hiver à venir"

Toutefois, si les bombardements israéliens ont cessé, les conditions de vie restent très précaires à Gaza. "Depuis le cessez-le-feu, les Gazaouis ont commencé à s’enquérir de leurs habitations, à essayer de retourner dans le nord du territoire et à se préparer à affronter l'hiver à venir alors que pratiquement aucun immeuble n’a été épargné par les destructions, que ce soit à Khan Younès (sud), dans la ville de Gaza ou dans le nord de la bande côtière en général", indique Bahaa Zaqout.

L'armée israélienne, qui avait lancé mi-septembre une large offensive terrestre pour s'emparer de Gaza-ville, désignée comme l'un des derniers bastions des combattants du Hamas, y a concentré ses bombardements. Les déplacés qui sont retournés sur place après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu – notamment dans les quartiers situés dans le nord-ouest de la ville – n'ont souvent trouvé que des décombres à la place de leurs maisons.

Cessez-le feu entre Israël et le Hamas : "les Gazaouis ont recommencé à respirer"
Vue aérienne de destructions dans le nord-ouest de la ville de Gaza, le 15 octobre 2025 © - / AFP

Selon des images aériennes de l'AFP, un grand nombre d’immeubles ont été détruits. Certains sont complètement effondrés, d'autres tiennent encore debout mais sont très endommagés. Au printemps, l'ONU estimait qu'environ 92 % des bâtiments résidentiels de la bande de Gaza avaient été endommagés ou détruits depuis le début de la guerre.

"Beaucoup de personnes ne peuvent pas ou ont renoncé à retourner à Gaza-ville en raison du niveau de destruction, qui a été sans précédent au cours des deux derniers mois, affirme Bahaa Zaqout. Mes propres parents, qui résident normalement à Gaza-ville, ont renoncé à s’y rendre, leur maison ayant été détruite, de même que le logement qu’ils avaient un temps loué dans le centre de Gaza-ville, après avoir été déplacés."

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Des bulldozers de la municipalité de Gaza déblayent les décombres des bâtiments sur les axes principaux et les rues de la ville de Gaza, le 14 octobre 2025 © - / AFP

Si comme ses parents, de nombreux déplacés sont restés dans le sud de Gaza "parce qu'ils n'ont pas d'endroit où aller", ceux qui ont fait le voyage vers le nord du territoire palestinien tentent de construire des abris de fortune à partir des débris de leur ancien logement.

"Tout le monde, ceux qui préfèrent patienter avant de rentrer comme ceux qui ont franchi le pas, attend des aides pour entamer la reconstruction et commencer à déblayer les décombres dans les zones dont les Israéliens se sont retirés, poursuit-il. Ils attendent notamment que les organisations humanitaires commencent à livrer des tentes afin de les installer près de leurs maisons détruites."

Affrontements et exécutions sommaires … une situation sécuritaire pesante

Interrogé sur la situation sécuritaire délétère, Bahaa Zaqout rapporte que "tous les habitants de Gaza sont préoccupés par le fait que le Hamas recommence à affirmer son pouvoir, en particulier dans les zones dont les Israéliens se sont retirés".

Le mouvement islamiste armé, au pouvoir depuis 2007 dans la bande côtière, a marqué son retour sur la scène intérieure le 14 octobre par une sanglante campagne de répression et en exécutant des "collaborateurs" présumés en place publique.

Des exécutions sommaires, filmées et diffusées sur Telegram via le compte de la chaîne de télévision Al-Aqsa, auxquels s’ajoutent des affrontements armés entre Palestiniens alors même que le désarmement du Hamas figure en bonne place dans le plan du président américain pour Gaza.

Lundi, le président américain a laissé entendre que le mouvement palestinien avait reçu le feu vert de Washington pour mener des opérations de sécurité dans la bande de Gaza, affirmant que le mouvement islamiste souhaitait "mettre fin aux problèmes" et que "nous lui avions donné notre accord pour une certaine période".

"Nous avons été un peu soulagés après l'annonce de Trump qu'il y avait un accord entre le lui et le Hamas pour essayer de reprendre un peu le contrôle de la situation à Gaza, souligne Bahaa Zaqout. Mais nous restons inquiets, car il y a des tirs incessants tous les jours, alors que le Hamas essaie de prendre le contrôle de la bande de Gaza, et pas seulement dans les zones dont les Israéliens se sont retirés."

Cessez-le feu entre Israël et le Hamas : "les Gazaouis ont recommencé à respirer"
Des Palestiniens déplacés retournent chez eux, le 14 octobre 2025 dans la zone d'al-Zahra dans la bande de Gaza. © Eyad Baba, AFP

Une certaine instabilité sécuritaire pesante qui explique pourquoi il n’ose pas encore se promener dans les rues avec ses enfants.

"Je sais qu'ils ont besoin de sortir, de voir d'autres personnes que celles qu'ils voient tous les jours à la maison ou de jouer avec d'autres enfants, mais nous devons faire preuve d'un peu de patience, conclut-il. Nous avons vécu 24 mois d’une guerre épouvantable, cela ne fait pas de mal d'attendre une ou deux semaines de plus."