
Un agriculteur français pulvérise du glyphosate dans le nord-ouest de la France, dans un champ de maïs, à proximité d'un parc éolien, le 23 avril 2021. © Jean-François Monier, AFP
Le tribunal de Vienne a jugé irrecevable, jeudi 31 juillet, la demande des parents de Théo Grataloup, 18 ans, de lier ses malformations congénitales à l'exposition de sa mère, enceinte, au glyphosate, un herbicide produit-phare du géant de la chimie Bayer-Monsanto.
La mère de Théo, Sabine Grataloup, estime que le handicap de son fils, né avec l'œsophage et la trachée qui ne se sont pas séparés correctement, trouve sa source en août 2006 quand elle était enceinte et avait utilisé du Glyper, un générique de l'herbicide Roundup de Monsanto, à base de glyphosate, pour désherber une carrière d'équitation.
Convaincus du "lien de causalité" entre le glyphosate et le handicap de leur fils, les parents avaient lancé en 2018 une action au civil pour faire reconnaître ce lien par les tribunaux. L'audience s'est déroulée le 3 avril devant le tribunal judiciaire de Vienne (Isère).
Dans son jugement rendu en délibéré que l'AFP a pu consulter, le tribunal estime que la famille de Théo n'a pas apporté la preuve suffisante que du glyphosate a bien été utilisé par Sabine Grataloup.
Ses déclarations "ne sont confortés par aucune facture, ou autres pièces, propres à établir l'achat d'un bidon de Glyper au cours de l'été 2005 qui aurait pu être utilisé au cours de l'été 2006", écrit le tribunal.
Vers un appel de la famille
Il pointe aussi que les photographies produites par la famille d'un bidon du Glyper, utilisé par la mère de Théo et distribué par la société Novajardin, ne peuvent correspondre au produit acheté en 2005 car distribué par une autre société.
Ces éléments "ne permettent de retenir avec la certitude requise que ce désherbant était du Glyper", a conclu le tribunal, reconnaissant néanmoins que Bayer/Monsanto "pouvait être considéré comme étant le producteur".
"C'est évidemment une grande déception pour la famille Grataloup et pour nous. (...) Ce dossier mérite d'être soumis à la Cour d'appel", a indiqué le cabinet d'avocats de la famille, dans un communiqué.
De son côté, Bayer "prend acte du jugement (...) qui n'a retenu aucune responsabilité à l'encontre du groupe. Cette décision intervient après plus de sept ans de procédure, dans un contexte humain douloureux, que l'entreprise n'a jamais ignoré".
Le glyphosate, herbicide le plus vendu au monde (800 000 tonnes en 2014), a été classé en 2015 comme un "cancérogène probable" par le Centre international de recherche sur le cancer de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Il est interdit en France depuis fin 2018 pour un usage domestique.
Bayer, exposé à de nombreux litiges coûteux autour de ce produit, a publiquement douté de son avenir commercial au printemps.
Avec AFP