
À chaque drame son lot de posts sur les réseaux sociaux. En déplacement en Gironde dans le cadre de sa campagne des élections européennes (9 juin), mercredi 15 mai, Marion Maréchal s’est rendue au centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan pour rebondir sur le drame d’Incarville, où deux agents pénitentiaires ont été tués dans l’attaque d’un fourgon pour permettre l’évasion du détenu Mohamed Amra.
Les images montrant la tête de liste de Reconquête! discutant avec les agents de cette prison symbole de la surpopulation carcérale en France – l'établissement affiche un taux de remplissage dépassant les 200 % – ont rapidement été postées sur X, Facebook et Instagram. Elles montrent une candidate à l’écoute des agents pénitentiaires et dénonçant une "faillite de l’État".
“Ce qui est insupportable avec ce gouvernement, c’est qu’il faut attendre qu'il y ait un drame pour qu'il y ait une réaction.” #Incarville pic.twitter.com/5EqDT9rY0U
— Marion Maréchal (@MarionMarechal) May 15, 2024Compassion sincère selon ses soutiens, récupération pour ses opposants : Marion Maréchal ne cesse de se montrer à l’affût des drames émaillant cette campagne électorale, et même des anniversaires des drames passés, qu’ils aient eu lieu en France ou ailleurs en Europe. Le meurtre du jeune Matisse à Châteauroux, les quatre ans de l’assassinat de Julien Vinson à Romans-sur-Isère, l’attaque terroriste dans la banlieue de Moscou, les 20 ans des attentats de Madrid, la mort du jeune Thomas à Crépol… Marion Maréchal surfe sur l’actualité macabre pour jouer la carte sécuritaire, le tout sans manquer de souligner la nationalité étrangère des assaillants.
La stratégie n’est pas nouvelle, mais reste efficace auprès d’un électorat de droite et d’extrême droite voyant l’immigration comme la cause des maux français et européens. "La France devient un narco-État. J’appelle d’urgence à des lois antimafia d’exception pour châtier ces criminels, éradiquer le trafic et stopper l’immigration", a écrit sur X Marion Maréchal, mardi, après l’attaque du fourgon pénitentiaire à Incarville.
"Combattre l’islamisation", une "cause européenne commune"
Pour la petite-fille de Jean-Marie Le Pen et nièce de Marine Le Pen, il s’agit d’alimenter le récit d’un supposé "choc des civilisations" et de crédibiliser la théorie complotiste du "grand remplacement".
La candidate d'extrême droite a d’ailleurs entrepris un "tour de France et d’Europe de l’islamisation", dont elle rend compte sur les réseaux sociaux. Dans ces vidéos, elle y dénonce pêle-mêle des "décorations pour le ramadan" installées par la maire de Francfort, la présence à Château-Chinon d’une "sulfureuse école coranique proche des Frères musulmans" ou encore des élus Les Républicains (LR) "islamo-droitistes" à Saint-Chamond.
🇫🇷 À Saint-Chamond, la lanceuse d’alerte @IsabelleSurply se bat contre l’islamisme et la passivité du maire LR en risquant sa vie.@fxbellamy quel est votre camp ? Condamnez-vous les élus LR islamodroitistes ?
Voici la 3ème étape du #GrandDévoilement.
⤵️ pic.twitter.com/LhIZsf6UGb
"Nous sommes les seuls à faire de la défense de notre civilisation la pierre angulaire de notre programme", a souligné Marion Maréchal, lundi 13 mai, lors de la conférence de presse de présentation de son programme, assurant vouloir "combattre l’islamisation", qui doit être une "cause européenne commune" selon elle.
"Nous défendrons l’inscription des racines grecques, latines et chrétiennes de l’Europe dans les traités" et "nous assumerons une diplomatie civilisationnelle en faveur des chrétiens d’Orient et de l’Arménie", a-t-elle ajouté.
Interdire la "promotion de l’idéologie woke"
Le parti d’Éric Zemmour propose donc une "triple frontière" pour protéger l’Europe, avec "la fin de la libre circulation pour les extraeuropéens", "le blocus militaire naval en Méditerranée" et une "frontière au-delà de nos frontières, à travers les accords de coopération avec les pays du pourtour méditerranéen pour lutter contre l'émigration".
Mais la liste Reconquête!, à laquelle les sondages attribuent entre 6 % et 8 % des intentions de vote, entend aussi protéger la France de l’Europe elle-même. Elle refuse tout ce qui pourrait mener à un "État fédéral européen" : pas de dette européenne, pas d’impôt européen, pas d’armée européenne. Et parmi ses propositions phares figure notamment la suppression de la Commission européenne.
"Ursula von der Leyen ne sera jamais notre cheffe, elle est notre employée et doit le rester", a martelé l’ancien candidat à la présidentielle Éric Zemmour lors de son propos introductif lundi soir, fustigeant ces "maîtres de l’Europe" coupables selon lui de vouloir "centraliser tout le pouvoir à Bruxelles".
Pour autant, Éric Zemmour et Marion Maréchal se disent favorables aux coopérations entre États et comptent bien peser avec le groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE) pour faire pencher clairement à droite le Parlement européen.
D’autant que leur combat civilisationnel se joue aussi sur le plan sociétal. Marion Maréchal promet ainsi d’interdire en Europe la "promotion de l’idéologie woke" – sans prendre la peine de la définir – et de supprimer "tout financement aux associations militantes LGBT".
